Une vague de froid extrême s’est abattue sur le nord des Etats-Unis à la fin du mois de janvier 2019 avec des températures descendues en dessous de -40°C dans certaines villes. A Chicago, les températures ont atteint -31°C, proche du record de froid absolu de -33°C enregistré en 1985. Dans d’autres villes, le mercure a chuté encore plus bas, jusqu’à -40°C à Mahnomen dans le Minnesota, avec un ressenti de -53°C.
Etienne Kapikian prévisionniste à Météo-France a expliqué au magazine en ligne GEO que cette vague de froid a été provoquée par l’éclatement du vortex polaire qui s’est produit à la fin de l’année 2018 à 30 km d’altitude. Le phénomène s’est ensuite propagé dans la troposphère et jusqu’à la surface de la Terre. Le vortex polaire est ce vaste tourbillon situé dans la stratosphère à 20-30 kilomètres d’altitude qui entoure les régions polaires de l’hémisphère nord et est animé par des vents qui tournent dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Cette circulation rapide permet en temps normal de maintenir l’air froid à des latitudes élevées près du pôle. Dans certaines conditions, ce vortex se détend et permet à l’air froid de s’écouler vers des latitudes méridionales : cela occasionne alors de sérieuses vagues de froid, comme celle qui vient de déferler aux Etats-Unis.
L’éclatement du vortex polaire est-il un effet du réchauffement climatique ?
En janvier 2018, des scientifiques américains ont publié une étude suggérant que des températures arctiques plus chaudes pourraient causer de fortes ondulations du jet-stream qui permettraient à l’air polaire de descendre plus vers le sud. C’est la théorie dite « arctique chaud, continents froids ». Selon Etienne Kapikian « il n’y a pas de consensus scientifique sur la question » : les preuves manquent encore pour le confirmer et des hypothèses contraires existent.
Si le vortex polaire est dû au réchauffement planétaire, alors pourquoi les vagues de froid américaines diminuent-elles ?
C’est le titre d’un article publié le 01 février 2019 par le Dr Roy spencer chercheur principal à l’Université de l’Alabama à Huntsville (Roy Spencer est avec John Christie responsable des mesures de températures par satellite dites UAH). L’article a été relayé par le Washington Times du 3 février.
La théorie selon laquelle la réduction de la banquise arctique (environ 15% au cours des 40 dernières années) serait la cause du déplacement du vortex polaire vers le sud-est n’est pas étayée par les observations. L’historique des vagues de froid aux Etats Unis depuis la fin du XIXe siècle (1895) tendrait même à prouver le contraire :
Vagues de froid dans 27 États du Midwest et de l’Est durant plus de deux jours et présentant des températures inférieures au 5ème centile des maxima quotidiens de janvier (Source John Christie).
Comme le montre le graphique ci-dessus, la tendance est nettement à la baisse notamment depuis 1979 date à laquelle nous disposons de mesures fiables de l’étendue de la banquise arctique à partir de radiomètres à micro-ondes embarqués sur des satellites. Rien ne permet donc de penser que la diminution de la banquise arctique au cours des dernières décennies ait entraîné un déplacement plus fréquent des masses d’air hivernales froides dans l’est des États-Unis. Pour autant, Roy Spencer, n’exclut pas que le déclin de la banquise arctique ait une certaine influence. Mais ces processus sont extrêmement complexes, avec des causes et des effets qui sont difficiles à établir. Il conclut ainsi son article :
au minimum, nous devrions exiger que les théories soient étayées par des observation solides. En l’espèce, le lien établi entre les vagues de froid à l’est des États-Unis et la banquise arctique n’est, au mieux, qu’hypothétique. Tout comme le sont la plupart des théories du changement climatique.