Évaluation du rôle de la variabilité interne dans les températures que nous prévoyons d’observer au cours des prochaines décennies

Nicola Maher (1), Flavio Lehner (2) and Jochem Marotzke (1)

Article initialement publié le 12 mai 2020 dans la revue Environmental Research Letters

Traduit de l’anglais par Serge Montagnac (obs-psr@orange.fr)

Résumé:

Sur des échelles de temps à court (15 ans) et à moyen terme (30 ans), la façon dont la température de surface de la Terre évolue peut être dominée par la variabilité interne, comme le montre la pause ou «hiatus» du réchauffement climatique. Dans cette étude, nous utilisons six grands ensembles à condition initiale à modèle unique (SMILE) et le projet d’Intercomparaison de Modèles Couplés (CMIP5) pour visualiser le rôle de la variabilité interne dans le contrôle des tendances observables de la température de surface, dans les projections à court et moyen terme, à partir de 2019. Nous confirmons qu’à court terme, les projections des tendances de la température de surface sont dominées par la variabilité interne, avec peu d’influence des différences de modèle structurel ou de l’évolution du réchauffement. De plus, nous démontrons que ce résultat est indépendant de l’estimation dépendante du modèle de l’ampleur de la variabilité interne. En effet, et peut-être contre intuitivement, dans tous les modèles, un manque de réchauffement, voire une tendance au refroidissement, pouvait être observé en tous les points individuels du globe, même sous les plus grandes émissions de gaz à effet de serre. La quasi équivalence des six SMILE et CMIP5 démontre la robustesse de ce résultat au choix des modèles utilisés. À moyen terme, nous confirmons que les différences de modèle structurel et les incertitudes des scénarios jouent un rôle plus important dans le contrôle des projections de tendance de la température de surface qu’elles ne l’ont fait sur une échelle de temps plus courte. De plus, nous montrons que la question de savoir si la variabilité interne domine toujours ou si les incertitudes du modèle et la variabilité interne sont d’une ampleur similaire dépend de l’estimation de la variabilité interne, qui diffère entre les SMILE. Enfin, nous montrons que même à trente ans, de grandes parties du globe (ou la majeure partie du globe en MPI-GE et CMIP5) pourraient encore ne pas connaître de réchauffement en raison de la variabilité interne.

1. Introduction

Les tendances à court terme des indices climatiques, comme la température moyenne de la surface de la planète, sont fortement influencées par la variabilité interne (par exemple Hawkins et Sutton 2009, Marotzke et Forster 2015). Cela signifie que bien que les émissions de gaz à effet de serre augmentent sans cesse, nous pourrions observer une tendance au refroidissement global au cours de la prochaine décennie, comme le démontre le récent ralentissement ou la pause du réchauffement climatique. À l’inverse, nous pourrions également observer une décennie de réchauffement accéléré qui dépasse ce à quoi nous nous attendions en raison des émissions actuelles (Meehlet al 2013). Dans cet article, nous démontrons visuellement le rôle de la variabilité interne des températures qui seront observées en chaque point du globe dans les décennies à venir et confirmons la prédominance de la variabilité interne dans les tendances à court terme.

Pour ce faire, nous utilisons une combinaison de six grands ensembles à condition initiale (SMILE) à modèle unique et de l’archive du projet d’Intercomparaison des Modèles Couplés-5 (CMIP5) pour étudier la plage des tendances de température projetées à partir de 2019. Contrairement aux études précédentes, avant la disponibilité de nombreux SMILEs, nous sommes en mesure de démontrer en plus l’effet de l’incertitude dans l’ampleur de la variabilité interne elle-même sur nos résultats.  La variabilité interne, ou variabilité chaotique du système climatique (Hasselmann 1976) est un concept difficile à communiquer (Deser et al 2012a). Il est souvent expliqué en termes d ‘« effet papillon », où un petit changement dans le présent peut entraîner un changement beaucoup plus important de l’état futur. C’est aussi un concept difficile à étudier en raison des observations courtes et spatialement incohérentes. En effet, pour véritablement étudier la variabilité interne observée de la température de surface de la Terre, il faut disposer de longs enregistrements d’observation dans de nombreuses conditions climatiques différentes, afin de pouvoir échantillonner la variabilité interne. En pratique, la variabilité interne peut être quantifiée et étudiée à l’aide de modèles climatiques,avec les outils efficaces de SMILE pour quantifier le rôle des petites perturbations dans le changement de la trajectoire à court et à long terme du système climatique.

Des SMILEs individuels ont été utilisés dans des études précédentes pour étudier le rôle de la variabilité interne dans les projections de température de surface de conduite, principalement sur des échelles de temps de 35 à 60 ans (Deseret al 2012b, Kay et al 2015, Deseret al 2016, Bengtsson et Hodges 2018), avec peu d’études examinant les échelles de temps plus courtes (par exemple Marotzke 2019). À ce jour, une seule étude, qui se concentre sur l’Amérique du Nord, a étudié les tendances de la température de surface sur 60 ans à partir de plusieurs SMILE (Deser et al 2020).

Fait important, cette étude a démontré que la variabilité interne de ces tendances diffère entre les SMILE (Deser et al 2020). En effet, tant Hawkins et Sutton (2009) que Kumar et Ganguly (2017) ont démontré que les différences de modèle dominent les tendances de température sur des échelles de temps plus longues, la variabilité interne dominant sur des échelles de temps plus courtes. En tant que tel, l’utilisation de nombreux SMILEs est essentielle pour identifier les incertitudes tant sur l’ampleur de la variabilité interne que sur la réponse forcée due aux différences de modèle. On ne sait pas non plus comment le taux d’émissions anthropiques de gaz à effet de serre évoluera au cours des prochaines décennies. La dernière génération de modèles climatiques a fonctionné avec quatre futurs possibles; RCP2.6, 4.5, 6.0 et 8.5. Les scientifiques ont suggéré que ces scénarios couvrent la gamme probable des émissions possibles de gaz à effet de serre pour le siècle à venir, mais la véritable trajectoire dépendra des changements de politique apportés par les gouvernements. Cette voie est connue pour être importante pour les projections à long terme, cependant, elle s’est avérée moins importante à court terme (Hawkins et Sutton 2009). En effet, lorsque les changements de RCP2.6 ont été comparés à un scénario RCP4.5 dans le Grand Ensemble de l’Institut Max Planck (MPI-GE), un chevauchement important des températures mondiales dans les projections à court terme a été trouvé (Marotzke 2019).

Lorsque les températures extrêmes ont été prises en compte dans le Community Earth System Model Large Ensemble (CESM-LE) sous les scénarios RCP4.5 et RCP8.5, des différences statistiquement significatives n’ont été trouvées qu’en 2050 (Lehner et al 2016, Tebaldi et Wehner 2018), démontrant à nouveau que les différences de parcours peuvent être moins importantes à court et moyen terme. De nombreuses études antérieures se sont concentrées sur la détection du signal climatique et son attribution aux émissions anthropiques de gaz à effet de serre (par exemple Stone et al 2007). D’autres études utilisent de grands ensembles pour identifier quand un signal émergera du bruit ou de la variabilité interne. C’est ce que l’on appelle le moment de l’émergence (par exemple Hawkins et Sutton 2012, Tebaldi et Friedlingstein 2013). Dans cette étude, nous retournons ce concept pour regarder non pas quand un signal émergera ou quand il pourra être détecté et attribué, mais comment la variabilité interne simulée peut influencer le climat observé dans les décennies à venir.  Cela est important pour les décideurs politiques pour déterminer l’éventail des futurs possibles qui pourraient être observés.

Le but de cet article est triple. Nous allons :

a) Démontrer visuellement le rôle de la variabilité interne dans la conduite du climat observé.

b) Illustrer les tendances maximales et minimales possibles à chaque point du globe à la fois à court terme (15 ans) et à moyen terme (30 ans).

c) Étudier l’importance relative ponctuelle de la variabilité interne, des incertitudes des scénarios et des différences entre les modèles dans le contrôle des tendances de température à la fois à court et à moyen terme. Ici, nous incluons une nouvelle estimation de la façon dont les différences de modèle dans la quantification de la variabilité interne affectent l’importance relative de ces quantités.

2. Modèles

Dans cette étude, nous utilisons six SMILEs pour étudier la variabilité interne des tendances de la température de surface (température de la peau; ts). La variabilité interne et les biais moyens du modèle sont indiqués dans la figure supplémentaire 1 (stacks.iop.org/ERL/15/054014/mmedia).

Les SMILE sont tous des modèles de classe CMIP5 exécutés avec le forçage CMIP5:

• The Max Planck institute Grand Ensemble (MPI-GE) (Maher et al 2019). This model has 100 ensemble members available for RCP2.6, RCP4.5 and RCP8.5 scenarios.

• The Canadian Earth System Model Large Ensembles (CanESM2-LE) (Kirchmeier-Young et al 2017). This model has 50 ensemble members available for RCP8.5.

• The Large Ensemble Community Project (CESMLE) (Kay et al 2015). This model has 40 members available for RCP8.5.

• The Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation Large Ensemble (CSIRO-Mk3.6-LE). (Jeffrey et al 2012). This model has 30 members for RCP8.5.

• Geophysical Fluid Dynamics Laboratory Earth System Model Large Ensemble (GFDL-ESM2MLE). (Rodgerset al 2015). This model has 30 members for RCP8.5.

• Geophysical Fluid Dynamics Laboratory Large Ensemble (GFDL-CM3-LE) (Sun et al 2018). This model has 20 members for RCP8.5.

Figure 1. Tendance à court terme (2019-2034) de la température de surface.

Montré pour la tendance de la température de surface moyenne mondiale maximale (rangée du haut) et minimale (deuxième rangée) et la tendance moyenne (rangée du bas). Toutes les tendances sont présentées sous forme de moyenne des six SMILE (à gauche) et de la moyenne CMIP5 (à droite). Tous les panneaux utilisent le scénario RCP 8.5. Nous utilisons en outre tous les membres d’ensemble disponibles de l’archive CMIP5 (tableau supplémentaire 1), qui ont la température de surface du champ (en CMIP; ts) disponible. Nous n’appliquons aucune pondération de modèle. Nous ne sélectionnons pas les membres de l’ensemble qui existent pour tous les scénarios (RCP2.6, RCP4.5 et RCP8.5 dans cette étude), ce qui signifie que différents modèles et différents nombres de membres de l’ensemble peuvent être utilisés pour chaque scénario.

3. Projections à court terme (2019-2034)

La tendance moyenne à court terme à chaque point du globe (2019-2034) et la tendance à chaque point de la grille lorsque la tendance de la température de surface globale est à la fois maximale et minimale est démontrée pour la moyenne des SMILE et CMIP5 de la figure 1. Nous constatons que les SMILE répliquent largement la réponse CMIP5, bien qu’ils ne soient constitués que de 6 modèles. Cela met en évidence le rôle important de la variabilité interne dans la conduite de la propagation CMIP5 sur des échelles de temps courtes. Les principales différences entre CMIP5 et les SMILEs se trouvent aux latitudes élevées lorsque la tendance de la température de surface globale est minimale. Dans ce cas, le CMIP5 montre un refroidissement plus important que les SMILE, ce qui suggère que dans ce cas, les SMILE ne couvrent pas tout à fait la gamme des résultats possibles du modèle aux latitudes élevées. Lorsque la tendance de la température de surface globale est minimale, le CMIP5 et les SMILE affichent un schéma de type Oscillation du Pacifique interdécennale (IPO) négatif (figure 1; rangée du haut, modèles individuels dans les figures supplémentaires 2 et 3), tandis que lorsque la tendance de la température de surface globale est au maximum, toutes les cartes montrent un modèle positif de type IPO (figure 1; rangée du milieu, modèles individuels dans les figures supplémentaires 2 et 3). Ce résultat est en accord avec Meehl et al (2013) et Maher et al (2014), qui ont démontré pour CCSM4 et CMIP5, respectivement, que des décennies de refroidissement ressemblent à un schéma de type IPO négatif et des décennies de réchauffement accéléré ont tendance à ressembler à un motif IPO positif.

Figure 2. Rôle en pourcentage de la variabilité interne (rangée du haut), de l’incertitude du modèle (rangée du milieu) et de l’incertitude du scénario (rangée du bas). Montré pour les tendances à court terme (gauche; 2019-2034) et à moyen terme (droite; 2019-2049). La variabilité interne est calculée comme l’écart type d’un seul SMILE, puis moyennée entre les SMILE. L’incertitude du modèle est calculée comme l’écart type des six moyennes SMILE. L’incertitude du scénario est calculée comme l’écart type entre les moyennes MPI-GE des trois scénarios.

Nous étudions ensuite l’importance relative de la variabilité interne, les différences structurelles du modèle et l’incertitude du scénario en complétant une décomposition similaire à celle de Hawkins et Sutton (2009) (figure 2; à gauche colonne). La figure 2 montre que la variabilité interne domine la tendance à court terme de la température à tous les points de la grille, confirmant les résultats de Hawkins et Sutton (2009), à la fois avec une nouvelle génération de modèles et à une résolution plus élevée. La quasi-équivalence de chacun des SMILE et CMIP5 (figure 1; figures supplémentaires 2 et 3) confirme la robustesse de ce résultat et démontre que les conclusions tirées des SMILE peuvent être étendues à l’archive CMIP5 plus grande. Sur la base de cette confirmation, lorsque nous étudions la sensibilité de ce résultat à l’incertitude de la variabilité interne elle-même, nous constatons que la dominance de la variabilité interne par rapport aux deux autres incertitudes tient si nous échantillonnons pour l’estimation de la variabilité maximale ou minimale à partir de SMILEs (figure 3). Cela souligne la robustesse de la dominance de la variabilité interne sur l’échelle de temps à court terme. Nous visualisons également quelles pourraient être les tendances les plus grandes et les plus petites à un endroit donné du globe (notez que ces tendances sont très peu susceptibles de se produire en même temps dans le monde entier), et déterminons la probabilité d’un réchauffement à court terme à chaque emplacement (figure 4). Nous présentons ces résultats à l’aide de MPI-GE (RCP2.6 et RCP8.5) et CESM-LE (RCP8.5), car ces modèles représentent la propagation de tous les SMILE avec RCP2.6 et RCP8.5 couvrant la propagation du scénario (résultats du modèle individuel; figures supplémentaires 4 et 5). Nous confirmons, encore une fois, que sur des échelles de temps courtes, ce ne sont pas les différences de modèle ou les incertitudes de scénario qui dominent la tendance de température qui pourrait être observée à chaque emplacement. Ce qui sera observé dans les 15 prochaines années est largement déterminé par la variabilité interne. Contre intuitivement à ce à quoi on pourrait s’attendre compte tenu des émissions de gaz à effet de serre toujours croissantes, la figure 4 démontre visuellement qu’en tous les endroits une tendance au refroidissement (ou à une absence de tendance au réchauffement) pourrait être observée en raison de la grande variabilité interne à court terme. Nous montrons cependant que tous les endroits, à l’exception de l’océan Austral et de l’océan Atlantique Nord, sont beaucoup plus susceptibles de se réchauffer que de se refroidir, ce qui démontre le rôle de l’augmentation des gaz à effet de serre (la réponse forcée). Cette probabilité augmente avec l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, comme le montrent les différences entre les deux scénarios MPI-GE et les deux scénarios CMIP5 (figure supplémentaire 5). Encore une fois, nous soulignons la robustesse de ces résultats étant donné les résultats presque identiques trouvés dans tous les SMILE et CMIP5 individuels (figures supplémentaires 4 et 5).

Figure 3. Rôle en pourcentage de la variabilité interne minimale et maximale possible (rangée du haut), de l’incertitude du modèle (rangée du milieu) et de l’incertitude du scénario (rangée du bas) à court terme (2019-2034; deux panneaux de gauche) et à moyen terme (2019-2049; à droite deux panneaux) tendances. La variabilité interne est calculée comme l’écart type minimum ou maximum par rapport aux SMILE. L’incertitude du modèle est calculée comme l’écart type des six moyennes SMILE. L’incertitude du scénario est calculée comme l’écart type entre les moyennes MPI-GE des trois scénarios.
Figure 4. Tendance ponctuelle maximale (rangée du haut) et minimale (rangée du milieu) à court terme (2019-2034) de la température de surface, et pourcentage des membres de l’ensemble avec une tendance à la hausse de la température de surface (rangée du bas). Représenté pour le scénario MPI-GE, RCP2.6 (à gauche) et le scénario RCP8.5 (au milieu), et le scénario CESM-LE, RCP8.5 (à droite). Notez qu’il est très peu probable que ces tendances se produisent en même temps à travers le monde.
Figure 5. Tendance moyenne de la température de surface à moyen terme (2019-2049) (rangée du haut). Tendance ponctuelle maximale (deuxième rangée) et minimale (troisième rangée) de la température de surface, et pourcentage des membres de l’ensemble avec une tendance à la hausse de la température de surface (rangée du bas). Représenté pour le scénario MPI-GE, RCP2.6 (à gauche) et le scénario RCP8.5 (au milieu), et le scénario CESM-LE, RCP8.5 (à droite). Notez qu’il est très peu probable que ces tendances se produisent en même temps à travers le monde.

4. Projections à moyen terme (2019-2049)

De plus, nous étudions le rôle de la variabilité interne dans les projections à moyen terme (2019-2049) de la température de surface. Même si les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté par rapport à l’échelle de temps à court terme, nous constatons toujours que de nombreux endroits individuels pourraient connaître un refroidissement ou un manque de réchauffement à cette échelle de temps à moyen terme en raison de la variabilité interne (figure 5). Ce résultat dépend davantage du modèle que pour le court terme, le MPI-GE montrant une tendance de refroidissement potentielle plus importante que le CESM-LE. Dans le MPI-GE, presque tous les emplacements terrestres pourraient connaître une absence de tendance au réchauffement, même sous RCP8.5, alors que cela n’est vrai que pour environ la moitié des points terrestres du CESM-LE. En général, les tendances minimale, moyenne et maximale sont plus importantes dans CESM-LE, CanESM2-LE et GFDL-CM3-LE, que dans MPI-GE et GFDL-ESM2M-LE, avec CSIRO-Mk3.6-LE quelque part entre les deux ( Figures supplémentaires 6 à 9). Cela se reflète également dans la probabilité de réchauffement à chaque endroit, les modèles présentant des tendances plus importantes, montrant une plus grande probabilité de réchauffement (figure 5, rangée du bas). Cela démontre que le taux de réchauffement dans différents modèles fait une différence par rapport aux projections à moyen terme. Les différences de scénario peuvent également être visuellement considérées comme plus importantes sur l’échelle de temps à moyen terme que sur l’échelle de temps à court terme, les scénarios plus chauds montrant des tendances maximales, minimales et moyennes plus importantes et une plus grande probabilité de réchauffement (figure supplémentaire 9). Lorsque nous quantifions les rôles relatifs des différentes incertitudes pour l’échelle de temps à moyen terme, nous constatons que la variabilité interne est toujours le principal moteur de ce que nous observerons (figure 2; colonne de droite), mais les incertitudes du modèle et les liens incertains des scénarios jouent un rôle plus important que sur l’échelle de temps à court terme, les incertitudes du modèle étant la plus grande des deux, confirmant à nouveau les résultats généraux de Hawkins et Sutton (2009). Ce résultat dépend cependant de l’ampleur de la variabilité interne simulée par les différents SMILEs, ce qui ne peut être démontré qu’en utilisant la grande archive de SMILEs maintenant disponible. Ici, nous constatons qu’une estimation faible de la variabilité interne signifierait que l’incertitude du modèle devient le principal moteur, tandis qu’une estimation élevée montre que la variabilité interne est clairement le moteur (figure 3). Cela montre que les différences de modèle dans la variabilité interne sont effectivement importantes pour faire des projections à moyen terme. Plus récemment, il a été souligné que la variabilité interne des SMILEs n’est pas la même (Deser et al 2020). Ces différences pourraient être dues au fait que tous les modèles n’ont pas la même variabilité interne (par exemple Sutton et al 2015) ou au fait que la variabilité interne elle-même peut changer sous un forçage externe (par exemple Maheret al 2015). Cela n’a pas été précédemment pris en compte dans la ventilation de type Hawkins et Sutton.

5. Résumé et conclusions

Cette étude est la première à étudier les tendances de température projetées ponctuellement dans le monde entier dans les deux (six) SMILEs multiples et CMIP5. Hawkins et Sutton (2009) ont initialement démontré le rôle déterminant de la variabilité interne, des différences de modèle et de l’incertitude des scénarios à différentes échelles de temps. Cependant, ils n’ont pas été en mesure de rendre compte du fait que la variabilité interne dans tous les modèles n’est pas la même et que cette variabilité elle-même peut changer à l’avenir (par exemple Sutton et al 2015, Maher et al 2019, Deseret al 2020). Ici, nous confirmons les résultats de Hawkins et Sutton (2009) avec une génération plus récente de modèles climatiques et à une résolution spatiale plus élevée, en utilisant plusieurs SMILEs et CMIP5 en accord avec Lehner et al (en revue 2020). Nous nous appuyons sur ces résultats, en démontrant leur remarquable robustesse et en examinant en outre les incertitudes dues aux différences de variabilité interne entre les différents modèles. Nous confirmons d’abord que sur des échelles de temps à court terme (15 ans), les tendances de température sont dominées par la variabilité interne. Ce résultat se révèle remarquablement robuste. Il existe une quasi-équivalence entre les six SMILE individuels et CMIP5, ce qui démontre que les résultats SMILE sont valables lors de l’utilisation de tous les modèles climatiques disponibles. Nous constatons que la variabilité interne domine les projections même lorsque nous prenons la plus petite estimation de la variabilité interne disponible à partir des SMILE. Deuxièmement, nous confirmons que sur les échelles de temps à moyen terme (30 ans), la variabilité interne est toujours importante pour déterminer les tendances de température, mais dans ce cas, les différences de modèle structurel et l’incertitude du scénario (ou de la trajectoire) comptent également, les différences de modèle ayant le plus grand importance des deux. En raison de la disponibilité de plusieurs SMILEs, nous montrons en outre que l’importance relative de la variabilité interne et des différences de modèle dépend de la représentation des modèles de la variabilité interne. On constate que l’incertitude du modèle est le principal moteur des tendances à moyen terme lorsque nous prenons une estimation faible de la variabilité interne, alors qu’avec une estimation élevée, la variabilité interne domine plutôt. Ce résultat met en évidence l’importance de l’utilisation de plusieurs SMILE, avec une gamme d’estimations de la variabilité interne dans les études futures portant sur des échelles de temps à moyen terme et souligne l’importance d’évaluer non seulement l’état moyen ou la tendance forcée d’un modèle, mais aussi sa variabilité interne. En raison de la difficulté à communiquer ce qu’est la variabilité interne et son importance dans la conduite du climat que nous observons, nous avons créé des cartes pour visualiser les tendances futures maximales et minimales globales et ponctuelles qui pourraient se produire à court et à moyen terme. échelles de temps. Ces cartes démontrent clairement le refroidissement qui pourrait se produire sous l’augmentation des gaz à effet de serre, causée par la variabilité interne. À court terme, tous les points du globe pourraient connaître individuellement un refroidissement ou pas de réchauffement, bien que dans un sens probabiliste, ils soient beaucoup plus susceptibles de se réchauffer. Bien que chaque point de la grille puisse encore se refroidir à l’avenir, Sippel et al (2020) ont récemment démontré que le changement climatique est toujours détectable dans le schéma des anomalies de température mondiale à un jour donné. Nous constatons que même à moyen terme, une grande partie du globe pourrait par hasard ne pas connaître de tendance au réchauffement en raison de la variabilité interne, bien que ce résultat dépende quelque peu du modèle. Ces cartes offrent un moyen facile de visualiser l’importance de la variabilité interne à la fois à court et à moyen terme et peuvent être utilisées comme un outil pour comprendre ce que nous observons tel que nous l’observons au cours des prochaines décennies.


(1) Max Planck Institute for Meteorology, Hamburg, Germany

(2) Institute for Atmospheric and Climate Science, ETH Zürich, Zürich, Switzerland and Climate and Global Dynamics Laboratory, National Center for Atmospheric Research, Boulder, United States of America

Remerciements.

Nous remercions le groupe de travail US CLIVAR sur les grands ensembles pour avoir fourni une grande partie des données sur les grands ensembles et Maria Rugenstein pour avoir effectué un examen interne. Nous remercions le Groupe de travail sur la modélisation couplée du Programme mondial de recherche sur le climat, qui est responsable du CMIP, et nous remercions les groupes de modélisation du climat (répertoriés dans le tableau supplémentaire 1 de ce document) pour la production et la mise à disposition de leur modèle.

Pour le CMIP, le programme de diagnostic et d’Intercomparaison des Modèles Climatiques du Département de l’énergie des États-Unis fournit un soutien coordonné et conduit le développement d’une infrastructure logicielle en partenariat avec l’Organisation mondiale pour les portails scientifiques du système terrestre. Flavio Lehner a été soutenu par une bourse suisse NSF Ambizione (projet PZ00P2_174128) et par U.S. NSF AGS-0856145, amendement 87. Le National Center for Atmospheric Research est parrainé par la U S National Science Foundation.


Disponibilité des données.

Les données qui appuient les conclusions de cette étude sont librement disponibles aux endroits suivants:

• MPI-GE https://esgf-data.dkrz.de/projects/mpi-ge/

• Tous les autres grands ensembles http://www.cesm.ucar.edu/projects/community-projects/MMLEA/

• CMIP5 https://esgf-node.llnl.gov/search/cmip5/

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Pour citer cet article:

Nicola Maher et al 2020 Environ. Res. Lett. 15 054014


Notes du traducteur:

– Intercomparaison : comparaisons entre laboratoires.

– Pacific decadal oscillation (P.D.O.)

  Oscillation Décennale du Pacifique.

– El Nino Southern Oscillation (E.N.S.O)

– Atlantic Multidecadal Oscillation (A.M.O)

  Oscillation Multidécennale de l’Atlantique.

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