Peut-on observer un changement dans le bilan de CO2 à cause de COVID-19 ?

Article initialement publié en anglais sur le site Global Monitoring Laboratory de la NOAA

Traduit par Camille Veyres (les notes du traducteur [NdT] ont été placées entre crochets.


Cette question nous est fréquemment posée : Les émissions de CO2 provenant de la combustion de combustibles fossiles sont plus faibles en raison de la pandémie, alors pourquoi le CO2 atmosphérique ne diminue-t-il pas également ?

Il n’y a pas de destruction photochimique du CO2 atmosphérique comme c’est le cas pour de nombreux autres gaz, le méthane par exemple, auquel cas des émissions continues sont nécessaires juste pour maintenir son abondance dans l’atmosphère constante. En revanche, le CO2 atmosphérique peut se dissoudre dans l’eau et peut être transformé par photosynthèse dans les plantes en bois et autres matières organiques. Cependant, ces transferts ne sont pas permanents car le carbone peut revenir, et c’est effectivement le cas, sous forme de CO2. Dans les océans, un équilibre se développe dans lequel autant de CO2 quitte les océans qu’il y entre. Dans les plantes et les sols, un état d’équilibre se développe dans lequel le taux de photosynthèse est égal au taux d’oxydation du carbone en CO2 par la respiration des organismes vivants et par les incendies. [NdT :  ces prétendues égalités entre ce qui entre et ce qui sort des océans et de la végétation n’existent pas ; il s’en faut de beaucoup !]  Nous faisons nous-mêmes partie de ce processus en expirant dans notre respiration des niveaux élevés de CO2. Il a été produit dans nos cellules et dans nos intestins par des microbes qui digèrent la nourriture qui nous donne l’énergie nécessaire pour vivre. Nous brûlons également des forêts. L’atmosphère, les océans et la biosphère terrestre agissent comme un réservoir interconnecté d’où le carbone ne disparaît pas dans un sens pratique  [NdT  Le grand réservoir interconnecté contient quelque 41 000 Gt-C (milliards de tonnes de carbone contenu) et le cumul des « émissions »  de 1751 à 2020 fait en gros 440 Gt-C, soit à peine plus de 1% du contenu dudit réservoir ; 1% peut-il avoir un effet ?  C’est moins que l’ordre de grandeur des incertitudes sur le contenu du grand réservoir !]. Seules l’altération et la formation des roches peuvent le faire, mais ce sont des gouttes minuscules en comparaison. Par conséquent, le CO2 provenant de la combustion de combustibles fossiles ne peut qu’augmenter la quantité totale de carbone dans ce réservoir.

Pour que nous puissions détecter la baisse des émissions causée par la pandémie, elle doit être suffisamment importante pour se démarquer de la variabilité naturelle du CO2 causée par la façon dont les plantes et les sols réagissent aux variations saisonnières et annuelles de température, d’humidité, d’humidité du sol, etc. Le CO2 augmente partout dans l’atmosphère, mais des cycles saisonniers s’y superposent. [NdT : Les cycles saisonniers sont bien connus et assez stables -7 ppm de mai à octobre et +9 ppm d’octobre à mai ] [NdT voici les relevés mensuels récents du  MLO (Mauna Loa Observatory) jusqu’à octobre 2020 : les écarts très variables d’une année à l’autre pour un même mois reflètent les températures assez variables de la zone intertropicale de dégazage océanique].

 Après suppression de la tendance à l’augmentation à long terme sur chaque site, on se retrouve avec un cycle saisonnier causé principalement par la photosynthèse et la respiration saisonnières des écosystèmes terrestres. Les trois figures ci-dessous montrent le cycle saisonnier moyen sur 10 ans, et les variations d’une année sur l’autre. Ces variations naturelles sont importantes et, jusqu’à présent, les émissions “manquantes” n’ont pas été visibles .

En voici un exemple : Si les émissions sont réduites de 25 %, la moyenne mensuelle de CO2 pour le mois de mars au Mauna Loa devrait être réduite d’environ 0,2 ppm, puis de 0,2 ppm supplémentaire en avril, etc. Ainsi, lorsque nous comparons le cycle saisonnier moyen de plusieurs années, nous nous attendons à ce qu’une différence s’accumule en 2020 après un certain nombre de mois.

 L’Agence internationale de l’énergie prévoit une baisse de 8 % des émissions mondiales de CO2 cette année. Il est clair que nous ne pouvons en moins d’un an pas voir un tel effet global. En outre, les incendies produisent du CO2 à un rythme peut-être comparable à la modeste diminution des émissions résultant de la pandémie. Il semble bien que le CO2 continue d’augmenter au même rythme que les années précédentes, ce qui montre que nous devons faire des investissements agressifs dans les sources d’énergie renouvelables pour faire face à l’urgence de notre réchauffement mondial.

Figure de gauche (cliquez ici pour l’agrandir), panneau supérieur : À l’observatoire du Mauna Loa, après avoir supprimé l’augmentation à long terme du CO2, on laisse la composante purement saisonnière. Elle est presque entièrement causée par les plantes et les sols terrestres. La ligne bleue représente le cycle saisonnier moyen au cours de la période 2010-2020. La bande grise montre la variabilité du cycle saisonnier (un écart-type) au cours des différentes années. La ligne rouge représente le cycle saisonnier en 2020 jusqu’à présent. Le panneau inférieur ne montre que les écarts par rapport à la ligne bleue ci-dessus pour la bande d’incertitude grise et la ligne rouge. Figure du milieu (cliquez ici pour l’agrandir) : Même chose pour Pt. Barrow, sur le versant nord de l’Alaska. Notez le changement d’échelle sur l’axe des y. Figure de droite (cliquez ici pour l’agrandir) : pareil pour le Pôle Sud. Là encore, l’axe des y a une échelle différente.

La plupart des émissions proviennent des zones urbaines, de sorte qu’il peut être plus facile de constater une diminution des émissions sous le vent des villes, même si, dans ce cas également, elles doivent se démarquer des variations naturelles. Mais il existe une solution, la seule qui soit décisive. Les rayons cosmiques produisent du carbone 14 (14C) radioactif dans l’atmosphère, qui réagit avec l’oxygène pour devenir du 14CO2. Sous cette forme, il se dissout dans les océans et est absorbé par les plantes comme tous les autres CO2. Les combustibles fossiles n’ont pas de 14C car ils ont été formés il y a des millions d’années à partir de matières organiques. Ainsi, le 14C présent à l’origine dans la matière organique s’est décomposé il y a longtemps. Par conséquent, les mesures du 14 CO2 montrent combien le 14C a été dilué par l’ajout de CO2 fossile récent avec zéro 14C. D’autre part, le CO2 provenant des émissions et de l’absorption par les écosystèmes a une teneur en 14 CO2 très proche de celle du 14C et ne peut donc pas modifier l’atmosphère à cet égard.

[NdT : ces spéculations sur le 14C semblent ignorer que les essais thermonucléaires des années 1950 et 1960 ont injecté dans la stratosphère une masse de 14C de l’ordre 70% de la masse en 1950  de 14C atmosphérique produite par les rayons cosmiques. Les quelques 6% de CO2 « fossile » dans l’air sont donc imperceptibles car masqués par la vidange progressive du 14C de la stratosphère dans la troposphère]

East Coast Outflow  COVID-19

En avril 2020, le Laboratoire de surveillance mondiale a lancé une série de vols d’échantillonnage aérien au-dessus des principales zones métropolitaines de la côte est, répétant une expérience menée il y a deux ans, afin d’évaluer l’impact de la réponse des coronavirus sur la qualité de l’air et les émissions de gaz à effet de serre.

Le COVID-19 de la côte Est reproduit une série de vols en 2018 encerclant les villes de Washington, D.C., Baltimore, MD, Philadelphie, PA, New York, NY, et Boston, MA, pour mesurer les niveaux de méthane, de dioxyde de carbone, de monoxyde de carbone, d’éthane et d’ozone au vent et sous le vent de ces zones urbaines. Le méthane et le dioxyde de carbone sont les deux plus importants gaz à effet de serre produits par les centres urbains, tandis que le monoxyde de carbone est un précurseur de l’ozone troposphérique, une préoccupation majeure pour la qualité de l’air urbain.

L’objectif de cette nouvelle étude était de voir ce qui a changé dans les émissions de gaz à effet de serre et les polluants qui se forment depuis le début de COVID-19.

Jusqu’à présent, les entrepreneurs et collaborateurs de la NOAA ont effectué dix vols autour de la ville de New York, quatre vols autour des régions de Washington et de Baltimore, et quatre vols autour des régions de Providence et de Boston. Ces vols ont été financés par la NOAA, l’État du Maryland et le National Institute of Standards.

Des scientifiques des laboratoires des sciences chimiques et des ressources aériennes de la NOAA participent également à l’expérience ainsi que des chercheurs de l’université du Michigan, de l’université Columbia, de l’université du Maryland et de SUNY Stonybrook.

Partager

2 réflexions au sujet de « Peut-on observer un changement dans le bilan de CO2 à cause de COVID-19 ? »

  1. “Il semble bien que le CO2 continue d’augmenter au même rythme que les années précédentes, ce qui montre que nous devons faire des investissements agressifs dans les sources d’énergie renouvelables pour faire face à l’urgence de notre réchauffement mondial.”

    ?? la NOOA fait du shadock : “puisque réduire les émissions n’a aucun effet, alors il faut continuer à les réduire”… la science moderne est impressionnante… impressionnante d’obscurantisme

    Merci à Camille Veyres qui est le seul, que ce soit chez les climato-réalistes ou chez les climato-croyants, dont je n’arrive pas à débunker les arguments.

  2. Enfin de la veritable observation et des donnees coherentes.
    On ne laisse pas suffisamment parler la physique dans les discours sur le climat

    Merci

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

captcha