Les réchauffements stratosphériques soudains (2/2)

Brigitte Van Vliet-Lanoë, Directeur de recherche CNRS, Emérite, Brest, France ‘Publié le … sur le site Science climat et énergie)

Partie 2. La réchauffement du Vortex : le rôle du vente solaire et de l’ozone


Résumé de la première partie.

 Les vortex polaires terrestres sont le phénomène-clef du fonctionnement de notre atmosphère avec l’activité solaire. Après une année 2023 très chaude et très perturbée par une puissante activité solaire avec un réchauffement stratosphérique soudain important (RSS27/02) au niveau du vortex N (voir SCE 2023 ; Vinós, 2024). Dès l’automne 2023, un nouveau RSS est annoncé selon les médias pour début janvier 2024 avec une seconde poussée probable fin janvier (NOAA). Ce premier RSS (2/01/24) a été considéré comme responsable du changement de configuration météorologique avec vagues de froid aux États-Unis et en Europe en janvier.  Selon les prévisions du 15 janvier 2024, les vents induits dans la stratosphère par un vortex arctique affaibli, « atteignant tout juste le seuil d’un réchauffement stratosphérique soudain (RSS) majeur, est attendu le 16 janvier 2024 ». Cette situation ne s’est produite qu’un mois plus tard, du 13-16 février 2024 (voir partie II Observations). Un autre événement similaire s’est produit le 2/03/2024 et n’a duré que 2 jours, comme celui du 5/07/2023. Les chercheurs se questionnent sur l’évolution météorologique de cette année, suite au RSS de janvier, considéré comme une des conséquences du réchauffement anthropique de la troposphère. Les médias n’hésitent pas à envoyer des messages alarmants concernant en particulier un El Nino « exceptionnel »de ce printemps en relation avec le réchauffement anthropique.   

Nous démontrons que ces phénomènes sont liés aux perturbations induites sur les vortex polaires dans la stratosphère, en relation directe avec la qualité de l’insolation, la puissance des vents solaires et le mode de destruction de l’ozone stratosphérique. Ceci suggère que quelle que soit la puissance du vortex, c’est sa configuration spatiale et les vents solaires puissants qui amènent soit un RSS (vortex faible) ou un trou dans la couche d’ozone (vortex fort), en partie boosté par les halogènes naturels ou anthropiques. La strato-mésophère (turbosphère) est la clef de notre météo en connexion avec l’activité solaire.


Les températures de surface de l’Atlantique Nord ont présenté des niveaux historiquement chauds depuis le mois de mars 2023

Les hypothèses

Officiellement, au cours d’un RSS, le vortex polaire semblerait se décomposer ou se dédoubler, en étant accompagné d’un refroidissement au-dessus du réchauffement et d’une décélération de sa base, suivie d’un réchauffement de l’air aux latitudes polaires. Les températures de surface de l’Atlantique Nord ont présenté en 2023 des niveaux historiquement chauds depuis le mois de mars 2023, c’est à dire juste après le RSS 2023. Cela a été observable notamment au niveau des latitudes tropicales et subtropicales, mais aussi plus au nord, vers les latitudes moyennes.

Les RSS sont des événements qui impactent l’atmosphère de stratosphère supérieure et la mésosphère des deux hémisphères polaires sont, selon Baldwin et al. (2021) et Schranz et al. (2020), mais sous contrôle de la propagation vers le haut à partir de la troposphère d’ondes planétaires (Figure 7B, partie 1) notamment lié au relief. Les guides d’ondes sont hérités de configurations particulières des vents atmosphériques, ou «jets streams», sous la tropopause au-dessus de la surface irrégulière de la Terre. 

En en août 2019, l’activité planétaire se serait propagée vers le haut de la troposphère et aurait « eu pour effet d’affaiblir considérablement la rotation du vortex polaire sur toute la hauteur de la stratosphère » (Schrantz et al., 2020). Selon Shen et al. 2020, l’évènement antarctique de 2019 aurait été ensuite suivi par la remontée une onde planétaire record. Les RSS se réchaufferaient donc à partir de la troposphère réchauffée par l’homme (Cohen et al. 2014 & 2020 ; Albers et al. 2016 ; Shen et al. 2020, White et al., 2021, Curry, 2024). Selon Cohen en 2019, l’anticyclone de Sibérie pourrait même provoquer un transfert d’énergie radiative de la troposphère vers la stratosphère, sous influence non-démontrée des ondes planétaires. Les vents du vortex N s’affaibliraient, disparaîtraient ou sembleraient s’inverser pour s’écouler d’est en ouest. À la suite de cette séquence, l’air « froid » du vortex cyclonique est supposé descendre rapidement, provoquant une augmentation soudaine de la température stratosphérique jusqu’à 50º C en quelques jours. 

Le processus est à rechercher dans l’activité solaire et non dans l’activité anthropique

La troposphère et la tropopause tournent dans le même sens que le vortex (Figure 8). Les ondes planétaires se produisent en relation directe avec la rotation de la planète. Mörner, (2010 et al., 2020), ont proposé un ralentissement important de la rotation de la planète sous l’impact des vents solaires et non des ondes planétaires.  

Le processus RSS s’installe en une dizaine de jours de part et d’autre du maxima de rotation du vortex (Schranz et al., 2020). Les maxima peuvent être multiples ou instables comme l’est la vitesse du vortex (Schranz et al., 2020).  Par conséquent, vu la synchronicité des RSS avec les épisodes extrêmes de vent solaire et leur récurrence rapide en fonction du cycle à 11 ans (SCE, 2023), le processus est à rechercher dans l’activité solaire et non celle de l’homme (Figures 2 & 5 partie 1).

Figure 8  ( A) structure de l’atmosphère terrestre et évolution du vortex polaire et de l’ozone dans la turbosphère (stratosphère + mésosphère) d’après les images (NASA). Les altitudes indiquées sont sujettes à de légères variations selon les saisons et l’irradiance reçue. La relation avec les jets streams polaires troposphérique est explicitée. Pour le vortex avec trou d’ozone (B), les données, y compris le chlore, sont issues de Copernicus (ESA). Copie Figure 2 (partie 1). NB: la numérotation des figures poursuit celle de la partie 1.

Nous avons pu remarquer que des morphologies similaires du vortex cyclonique à 10 hPa sont liées à l’accolement ou la néoformation réactionnelle d’un contre-vortex de nature anticyclonique dans la zone externe de la gaine de vent du vortex et non d’une division du vortex, ce aussi bien en Antarctique ou en Arctique. Il peut y avoir plusieurs anticyclones dans les parages via les jets stratosphériques. Lors des RSS hivernaux des 3 dernières années, ces morphologies sont identiques aux 2 pôles mais ne sont pas spécifiques des périodes hivernales (Figure 9). Elles ne peuvent former un RSS qu’en hiver hémisphérique. 

La vitesse du vent solaire lent est normalement d’environ 300 km/sec. Elle varie peu en fonction du cycle solaire mais suit l’activité solaire, tous comme pour les vents rapides (Figure 5, partie 1). En revanche, le vent solaire rapide issus des EMCS, quant à lui varie entre 450 et 1000 km/sec (23/03 /24). Nous avons pu observer que lors de l’hiver Arctique, l’occurrence de vents rapides puissants peut faire apparaitre un RSS, si la morphologie associée à la stratosphère (30 km) est celle d’un vortex accolé à un contre-vortex (Figure 9).

A partir de l’orbite terrestre, les protons du vent solaire rapide devraient alors être environ 104 fois plus chauds parallèlement au champ magnétique, le long des lignes de champs du cornet polaire. Cela expliquerait aisément la coïncidence observée entre le pic de vents solaire rapide et les RSS (SCE, 2023) (Figure 5, partie 1). Ce vent est très chaud (≈ 10 000° K) et sa vitesse est de ± >600 km/sec (Mach ≈ 10), si bien que le transport de la matière solaire depuis la corona jusqu’à la terre prend environ 4 jours et son arrivée dans le champ magnétique terrestre est précédée par une onde de choc susceptible d’injecter du plasma dans le vortex. Cette onde de choc est essentiellement un convertisseur d’énergie cinétique du vent solaire rapide en énergie thermique (réchauffement)Les particules ont donc tendance à rebondir sur la gaine magnétique du cornet et donc de s’y accumuler, tout en préservant sa température, tout en accélérant par effet Venturi la vitesse superficielle de la gaine du contre-vortex (Boldyrev et al., 2020), en cohérence avec les observations, mais non les idées de Schranz et al. 2020. 

Evolution morphologique du vortex dans le temps et l’effet Venturi

Le vortex cyclonique hivernal arctique est généralement stable dans la stratosphère et la mésosphère, et également rapide (c.300 km/h). Le vortex se forme en général fin novembre début décembre. Lors de la formation du vortex sud, la zone turbulente polaire S se fait petit à petit digérer par une ou deux divergences anti-horaires du jet zonal via la formation de zones anticycloniques (10 hPa), et le jet s’accélère progressivement tout en montant en latitude pour alimenter le vortex, mais il sert également de rail pour la migration d’anticyclones dérivés. 

Un suivi de la morphologie du vortex polaire N, des vitesses de rotation et des températures à 10 hPa a été entrepris (hiver 2023-24). Il a commencé à se former tôt (11/2023). Le contre-vortex (un anticyclone), s’est formé indépendamment à plus basse latitude depuis le début décembre.  Le contre-vortex est ensuite remonté avec un vent zonal émanent du jet stratosphérique tropical d’Ouest depuis ~ 50° N au pôle et s’est ensuite accolé au vortex déjà affaibli (265 km/h puis 160 km/h). Fin décembre 2023la vitesse de rotation du vent s’ est s’accélérée très fortement dans la zone de transition entre les deux vortex avec des pointes à 380 km/h (8/ 01 /2024) alors que la vitesse du vortex L affaibli reste autour de 200 km/h avec une température avoisinant les -63°C : pas de réchauffement majeur du vortex L et un modeste du contre-vortex H (-21.8°C et 150 km h-1). D’autre part la juxtaposition dès décembre de ces 2 systèmes rotatifs a induit entre eux également un flux de vent comprimé qui se réchauffe plus ou moins rapidement, là où la compression par effet Venturi est maximale, soit en amont soit en aval de la zone comprimée (aval début janvier et amont à la mi-février). Cela abouti début janvier 2024 à un réchauffement modeste du vortex, un peu plus marqué du contre-vortex et très important de la zone de contact. L’échauffement maximal est atteint dans la zone de transition entre les 2 vortex L et H (+ 13°C en le 28/12/2018 ; – 6.3°C le 29/12/23 ; -2.4 °C le 3/01/24 ; -17°C le 6/01/24; Figures 3A, partie 1 et 10). Après cette période, le vent stratosphérique zonal anti-horaire qui nourrit le vortex L à 10 hPa, dérive ensuite début février en un contre vortex-étalé qui se transformera le 10/02 à 40°N en un jet stratosphérique zonal horaire. Le 13/02/2024 le même système de vortex juxtaposés s’est reformé avec -15°C et 350 km/sec sur la zone de contact, et enfin passant à -12.5°C et 306 km/h sur cette même zone le 15/02/24 et -26°C pour l’antivortex. Ensuite le vortex s’est dilacéré et a disparu en faveur du jet stratosphérique tropical N.

Figure 8 : Evolution du RSS du 25/12/18 (Méteo France). Noter l’apparition de l’anticyclone (H) qui se réchauffera (Météo France). En fait il remonte en latitude avec le vent zonal pour venir s’accoler à la gaine du vortex (L). Les organisations des vortex Arctique (3/01/24) et Antarctique sont comparables. Cette organisation est notamment associée aux solstices de chaque hémisphère. La ligne pointillée blanche souligne l’équateur stratosphérique (en bleu foncé). La zone de réchauffement n’est pas le vortex mais bien l’anticyclone accolé, le contre-vortex. Ce réchauffement est partiellement dû à un effet Venturi entre les 2 gaines de vortex. A noter que l’intensité du vent solaire lent est revenue à un niveau normal après le RSS, le 8/01/2024. 

En arctique, tous les évènements RSS de 2019, 2023 et début 2024 sont associé à un ou des pics successifs de vents solaires rapides : 900 km/sec le 27 /02/23, à 750 km/sec 1 le 01/01/2024, un à 850 km/sec le 12/02/24 et un dernier à 1000 km/sec le 23/03/24, mais sans la morphologie de couplage des vortex. Les températures atteintes lors des RSS dans la zone de contact entre les 2 vortex ont atteint +13°C fin 2018 et -2.5°C le 3/01/24 et de -25°C le 19/01/24 (Figures 5, partie 1 et 9). Les vitesses des vents dans la zone de contact ont atteint 380 km/h le 3/01/24.

Le rôle de l’ozone

L’ozone est créé de jour, dans la stratosphère, lorsque les UV solaires, très énergétiques, dissocient les molécules d’oxygène (O2) et forment ce gaz (O3). Cette réaction de synthèse de l’ozone est endothermique.  Vers 30 Kms d’altitude, en été hémisphérique (Figure partie I-2C), le rayonnement solaire est normalement encore suffisamment énergétique pour décomposer l’ozone, une réaction exothermique. 

La destruction de la couche d’ozone est probablement le principal des facteurs de réchauffement stratosphérique. En effet, la couche d’ozone s’épaissit entre la stratopause et la tropopause entre 16 et 50 km avec un pic de concentration estival vers 23-25 km d’altitude. Cette couche est plus épaisse en hiver et au début du printemps amenant un maximum de concentration entre 20 et 30 km, ≈ 15 km au-dessus de la tropopause. C’est curieusement là où les vents du vortex sont les plus rapides selon les observations de Schranz (et al. 2020) et surtout au contact vortex/contre-vortex (Figures 3A et 9). 

L’ozone peut se dégrader en hiver naturellement dans la stratosphère sous l’impact exclusif des vents solaires vu l’absence de rayonnement solaire direct, surtout avec adjonction de molécules destructrice telles que le chlore et les CFC (ici).)

Mais durant la nuit polaire, cette réaction exothermique est liée aux vents solaires, surtout rapides et contribuent fort probablement, comme nous l’avons vu plus haut, au réchauffement des RSSs. Ceci expliquerait l’apparition soudaine du RSS entre 25 et ≈ 50 km (jusqu’à 65 km pour les mesures de vitesse de Schranz et al. 2020) et sa synchronicité avec les pics de vents rapides (SCE, 2023). Une concentration d’ozone accrue après un RSS s’observe en dessous de 20 km.  

Le trou d’ozone

Il existe probablement une similitude du vortex hivernal lent avec le fonctionnement vortex hivernal rapide. Celui de l’Antarctique est horaire et le plus souvent très rapide avec un trou dans la couche d’ozone, centré sur début octobre mais disparait courant décembre. Le trou d’ozone de 2023 est guidé au niveau de la gaine de vents, érode la gaine d’ozone supérieure et induit des températures extrêmement froides (inférieures à -80 °C) dès le mois de juillet. Celui de 2022 n’a pas attaqué la couche haute.

Pour ce type de vortex, la réaction de destruction de l’ozone doit aussi exister sous l’impact des vents solaires, mais à moindre intensité et sans l’adjonction du facteur vortex/contre-vortex. La gaine de vent au niveau du vortex produit une vorticité complémentaire sous la forme de petits anticyclones latéraux en fin d’hiver. 

Le trou d’ozone antarctique de 2023 a été de taille exceptionnelle il s’est formé par ouverture vers le haut et à sa base. Ce processus a été favorisé par des apports halogènes, notamment du chlore destructeur comme lors de l’injection du panache volcanique de Hunga Tunga 15/01/22 (Zhu et al., 2023). Le maximum d’ouverture a été atteint le 15/09/23. La même chose peut être dite pour la taille du trou de 1991 (Pinatubo) et de 2010 (Mérapi). Vu la fréquence des méga-éruptions, les maximas d’extension du trou en cours de formation est probablement plus lié au volcanisme qu’aux seuls CFC. 

 La morphologie du trou antarctique (Figure 10) suggère une aspiration mécanique vers le bas depuis la haute stratosphère et une dissociation de l’ozone sous l’effet du vent solaire rapide. C’est probablement le mécanisme principal et logique de formation du trou d’ozone (Figure-2B, partie 1), qui pendant la durée de la nuit polaire est progressif et culmine en septembre/octobre (HS ; Figures , partie 1 et 10). C’est ce que montrent les images de concentration de ce gaz dans la « couche d’ozone » de l’ESA (Copernicus, Figure 10). 

Figure 10. Comparaison de la teneur en ozone entre du trou antarctique Sud au solstice et sa dégradation finale depuis le niveau de la mer jusqu’à la stratosphère. Dans l’animation, l’Antarctique est situé au milieu (à 90°S) et l’équateur est situé aux deux extrémités (à 8°W et 172°E). Au printemps de l’hémisphère sud, l’appauvrissement de la couche d’ozone est clairement visible dans la stratosphère.

Il est important de noter l’existence de grands cisaillements de soutirage (flèches, Figure 10), lié à la rotation du vortex qui affectent la morphologie de la couche d’ozone au niveau du trou en fin de vie qui entraine également une injection de l’air de la tropopause à sa base. Une concentration secondaire d’ozone, intensément cisaillée à l’aplomb de la gaine des vents du vortex se marque également au niveau de la tropopause. Etant donné le retard entre l’éruption d’Hunga-Tunga et son injection de chlore (15/01/22) et la formation du trou exceptionnel de 2023, ce serait plutôt l’extraordinaire activité solaire de 2023 avec des vents rapides fréquents qui contrôlerait la destruction de l’ozone. 

La décomposition de l’ozone sous l’effet de vent solaire rapide accentue le réchauffement soudain

Les vortex HS et HN ont tous globalement le même comportement hivernal entre 65 et 30 km d’altitude. Les différences sont essentiellement leur proximité avec le soleil et la nuit polaire en hiver hémisphérique (voir Partie I), expliquant la fréquence des RSS en Arctique. Si l’insolation (jets et vortex stratosphérique) ou le vent solaire sont trop faibles, le processus RSS ne se déclenche pas. Mais un vent solaire très rapide ne produit pas de RSS si la configuration des vents polaires ne présente pas un vortex et un contre-vortex accolés ou si sa vitesse est trop élevée. Le RSS se forme sur vortex lent, lorsqu’un couple vortex/contre-vortex s’est formé et qu’un pic de vent solaire rapide pénètre le cornet polaire, accentuant par effet Venturi dans la stratosphère un réchauffement accéléré dans la zone de contact entre les 2 vortex. Vers 30 km d’altitude, la décomposition de l’ozone sous l’effet de vent solaire rapide accentue le réchauffement soudain.

Des vortex aux jet-streams

Les vortex polaires transfèrent leur énergie cinétique à la stratosphère adjacente, formant des vortex secondaires qui peuvent évoluer en contre-vortex en hiver hémisphérique. Le contre-vortex anticyclonique transmet également cette énergie depuis la base de sa gaine de vents à la Tropopause induisant les jets streams troposphériques polaires sous-jacents et en s’élargissant sous 17km (Schranz et al. 2020) pour atteindre le cercle arctique voir plus : Ceci est à mettre en relation avec l’augmentation brutale de la teneur en vapeur d’eau et donc de densité au niveau de la tropopause. lorsque la vitesse du vortex est ralentie, Cette transmission amène un refroidissement de la basse stratosphère et de la tropopause et induit par friction de puissantes ondulations en contre-vortex des jets troposphériques au contact de la troposphère plus dense. Ceci est visible par l’animation du vortex antarctique (Copernicus). 

Ces derniers contre-vortex contraignent dans la troposphère des descentes polaires d’air froid et lourd anticyclonique au sein de la troposphère, emballés par le jet stream polaire. Ce sont les futurs Anticyclones Mobiles Polaires (AMP) (SCE, 2023). Ceci induit en retour des injections d’air tropical de nature dépressionnaire en direction des pôles, les canicules, et donc, contrôlent notre météo. La vitesse des jets troposphériques s’amortit à proximité de la surface terrestre, modulée par les ondes planétaires terrestres issu de la rugosité de la topographie continentale, mais non de celle de l’océan.En revanche, le jet stream polaire troposphérique est en temps normal aussi rapide que son équivalent stratosphérique sous la tropopause. Il maintient l’air plus froid dans le cercle arctique, créant des conditions plus tempérées pour la basse troposphère sur la plupart des États-Unis ou l’Europe (hors vortex).  La chaleur accumulée dans au centre du contre-vortex réchauffé par un RSS migre ensuite vers la tropopause, de la mi-octobre à décembre, injectant via la base d’un vortex ralenti sa chaleur résiduelle, mais peut être aussi les conséquences de l’effet de choc du vent solaire, dans la zone polaire responsable de la génération et de l’ondulation du jetstream troposphérique polaire. La longueur temporelle du réchauffement est en toute vraisemblance l’effet décalé du vent solaire lent associé, qui est pénétré directement dans le contre-vortex 3 jours plus tard, mais a également été stocké temporairement pendant >1 mois dans les ceintures radioactive de Van Allen.

Conclusions (parties 1 et 2)

Les épisodes de réchauffements stratosphériques soudains sont responsables de réchauffements transitoires de vortex ralentis en période d’insolation élevée, lorsqu’un jet de vent solaire rapide s’engouffre dans les cornets polaires, à la suite d’une EMCS et qu’un contre-vortex anticyclonique s’est accolé au vortex arctique ou antarctique. Une contribution de la destruction de l’ozone semble claire.  Il n’y a aucune preuve valide de l’impact d’ondes gravitaires dans ce processus. Ces réchauffements qui durent 2 à 4 mois peuvent être responsables de canicules ou d’épisodes majeurs à impact climatique vrai.  D’après les enregistrements 10Be, ces éjections de EMCS sont à l’origine de réchauffements troposphériques majeurs à l’origine des épisodes de déglaciation à 14,300 ka BP et 12,400 ka BP (Van Geel et Ziegler, 2013 ; Bard et al. 2023), ce qui suggère que ces phénomènes de RSS sont associés à une activité solaire particulièrement élevée, au moins en début d’interglaciaire.


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4 réflexions au sujet de « Les réchauffements stratosphériques soudains (2/2) »

  1. Lorsqu’on examine la courbe isotopique de l’oxygène, telle qu’elle est enregistrée dans le carbonate du squelette des organismes planctoniques océaniques au cours des 5 derniers millions d’années, on constate les choses suivantes :
    le signal est périodique ou quasi-périodique, avec des hauts (périodes chaudes) et des bas (périodes froides)
    La périodicité la plus nette dans cet intervalle de temps est celle (ou proche de celle) de l’inclinaison de l’axe de rotation de la Terre sur le plan de l’écliptique. Cette inclinaison varie (plus ou moins accentuée) sur une quasi-période de 40.000 ans. Elle explique d’une part l’existence de saisons au cours de l’année. D’autre part, ses variations au cours du cycle de 40.000 ans se traduisent par des durées du jour plus ou moins longues sur la demi-période.
    Sans changement de cette périodicité, on constate depuis 2,5 millions d’années une amplification des cycles isotopiques (chaud-froid) par rapport au Miocène terminal et au Pliocène. Il s’agit d’une dérive globale vers le froid. De plus, les interstades successifs ne reviennent plus au maximum du Pliocène, suggérant la persistance de calottes glaciaires modérées pendant les interstades.
    Au cours du dernier million d’années, la cyclicité à 40.000 ans est masquée par une nouvelle quasi-période qui apparaît, celle de l’eccentricité de l’orbite, à environ 100.000 ans. Ce sont les 9 dernières grandes glaciations quaternaires. Comme auparavant, les interstades sont plus frais et montrent une calotte glaciaire résiduelle, grosso-modo semblable à la calotte actuelle de l’interstade holocène dans lequel nous vivons. Interstade qui, soit dit en passant, a commu des variations assez nettes pour être enregistrées partout (les fameux optima, minoéen, romain, médiéval,…) dont l’origine n’est pas dans les paramètres de l’orbite.
    Enfin, l’analyse harmonique des cycles sédimentaires dans les dépots profonds des périodes plus reculées mettent en évidence la permanence de ces quasi-périodes proches de celles de l’orbite terrrestre (rotation sur lui-même de l’axe de rotation terrestre induisant la précession des équinoxes à 20.000 ans, oscillation de l’inclinaison de l’axe de rotation à 40.000 ans, et variation de l’eccentricité à 100.000 ans). C’est l’objet d’une discipline qui est la cyclostratigraphie, dont l’ambition est de raffiner les datations absolues obtenues par les méthodes basées sur la radioactivité naturelle.

    L’ensemble de ces observations tendrait à soutenir l’hypothèse de Milankovitch selon laquelle les variations de l’insolation engendrées par ces variables seraient la cause des glaciations.

    Mais il faut expliquer la lente dérive oscillante vers le froid depuis 2,5 millions d’années, avec des calottes glaciaires résiduelles de plus en plus importantes pendant les interstades. Comment trouver une explication alors que les quasi-périodes de l’orbite sont uniformément présentes dans le temps long. Il semble nécessaire de trouver un forçage ”externe” (hors paramètres de l’orbite) pour expliquer la dérive (amplification des oscillations chaud-froid).

    C’est bien là que le bât blesse. D’où l’idée que le soleil pourraît être le coupable. Une étoile est un corps fondamentalement instable dont les à-coups pourraient expliquer les glaciations intenses de courte durée que la Terre aurait connues dans des temps très reculés. A notre échelle de temps, le solel nous paraît quasi-stable. La dérive climatique constatée depuis 2,5 millions d’années, alors que les paramètres de l’orbite terrestre (ensoleillement) n’ont pas changé, est-elle causée par une diminution de l’activité solaire ? Mais alors, comment se fait-il que cette diminution soit apparemment contrôlée par (ou en accord avec) les paramètres orbitaux de notre planète ? Milankovitch a-t-il tort ? Est-ce à dire inversement que la façon dont la Terre tourne autrour du soleil serait capable de déclencher des instabilités dans le soleil elles-mêmes agissant sur le climat terrestre ? La Terre est petite, Jupiter et Saturne représentent des masses plus importantes plus susceptibles de déclencher des instabilités dans l’étoile. C’est l’objet des travaux menés par V. Courtillot et coll. à l’IPG de Paris ou d’autres encore comme feu N-A Mörner. Mais le mystère demeure.

    Les travaux auquels font allusion les deux article de Madame Van Vliet-Lanoë ouvrent des perspectives nouvelles sur la façon dont le soleil peut affecter le climat terrestre via les cornets polaires et les relations avec la très haute atmosphère. D’autres théories ont vu le jour (Svensmark). Le problème est loin d’être résolu.

    Alors, le CO2… Les tenants de l’hypothèse feraient bien de faire un peu de biblio géologique et physique.

    • Avec tout le respect que j’ai pour les travaux de Courtillot sur ce que vous évoquez et qui ont leur importance, il y a également une importance certaine des vents solaires, mise ici en évidence par Mme Van Vliet-Lanoë et je pense vraiment qu’elle nous met vraiment sur la bonne voie d’où il faudrait chercher.
      Voici un tout récent article qui vient appuyer l’importance des turbulences plasmatiques (ici un nuage interstellaire hyper dense qui modifie complètement les conditions du vent solaire dans lesquelles évolue notre système terre, ouvert) et qui implique des catastrophes climatiques comme ici lors d’une glaciation globale de 12000 ans il y a 2 millions d’années : https://phys.org/news/2024-06-astrophysicists-likelihood-earth-exposed-cold.html

      • Suite:
        C’est vrai que sur la courbe isotopique à laquelle je faisais allusion il y a des accidents soudains qu’on a du mal à expliquer, comme à 3,3 Ma et 2,4 Ma. 2,4 marque aussi un changement drastique dans l’alluvionnement péri alpin qui devient graveleux alors qu’il était sableux auparavant. C est amusant cette coïncidence entre tectonique alpine et événements extra-terrestres. La nature prend plaisir à brouiller les cartes.

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