Rémy Prud’homme, professeur des universités (émérite).
Article initialement publié par Valeurs actuelles le 30 novembre 2024
La COP 29, la grand’messe onusienne annuelle du Climat, qui s’est bizarrement tenue dans un pays pétrolier, s’est terminée par l’accord de Bakou, qui prévoit que les pays du Nord global vont au nom du climat donner chaque année « au moins » 300 milliards de dollars (autant d’euros) aux pays du Sud global. De l’Inde au Malawi, tous les pays du Sud, et quelques pays du Nord – dont la France – se lamentent et s’indignent de la modestie de ce chiffre. Pour mettre en perspective ce montant, on a cherché à le comparer à l’aide au développement actuelle.
L’OCDE s’efforce de collationner et d’additionner les flux d’aides Nord-Sud. Elle propose un chiffre annuel d’environ 200 milliards au cours des années passées. Cette aide est aux deux-tiers une aide bilatérale, qui va directement d’un pays donateur à un pays aidé ; et pour un tiers une aide multilatérale, qui passe par une institution internationale (ONU, Union européenne, etc.) financée par les pays du Nord. La distribution par secteur d’activité montre que ces 200 milliards sont beaucoup plus humanitaires que développementaux. Ils financent la santé, l’aide aux réfugiés, la gouvernance, la sécurité (en 2022, l’aide à l’Ukraine a significativement fait bondir le montant total), plutôt que l’infrastructure, l’agriculture, les entreprises, l’industrie. Cette remarque n’est pas une critique, d’autant plus que certaines dépenses, comme l’aide à la santé ou à l’enseignement, contribuent aussi au développement économique. Une grande partie de ces dons sont directement dépensés par les agences nationales ou internationales qui les accordent. Une autre partie est directement mise à la disposition des autorités nationales destinataires ; et ne fait pas toujours l’objet de contrôles très stricts.
Il semble que ce recensement ne concerne que l’aide qui prend la forme de dons, et ignore l’aide qui prend la forme de prêts, et en particulier l’action de la Banque Mondiale (et de ses « succursales » comme la Banque Inter-américaine de Développement, la Banque Africaine de Développement, la Banque Asiatique de Développement). Ces institutions internationales publiques, créées pour promouvoir le développement économique et social, effectuent des prêts (souvent à des taux réduits, qui finissent parfois à en faire de quasi dons) à des projets ou des politiques, et qui font l’objet de négociations et de suivis sérieux[1]. Le montant annuel de ces prêts s’élève à environ 100 milliards par an.
Au total, le montant actuel de l’aide du Nord au Sud s’élève donc à environ 300 milliards. C’est également le montant de l’aide supplémentaire prévue par l’accord de Bakou. Cet accord, considéré comme tragiquement insuffisant par des ministres français, et par la plupart des médias officiels, prévoit donc un doublement de l’aide du Nord au Sud. Il n’est insuffisant que relativement aux demandes du Sud, qui exigeait une augmentation de 1000 milliards, soit un quadruplement de l’aide actuelle. L’aide française s’élève actuellement à environ 10 milliards, et l’accord de Bakou implique donc pour la France quelque chose comme 10 milliards de plus.
Si le montant de l’accord est considérable, ses caractéristiques sont floues. On ne sait même pas exactement quels sont les pays du Nord et ceux du Sud (la Chine, qui est de très loin le premier responsable des rejets anthropiques de CO2 du globe, semble hors-jeu, ni contributeur ni receveur). On ne sait pas non plus selon quels critères ces centaines de milliards seront prélevés (combien paiera exactement la France ?), ni encore moins selon quels critères ils seront distribués (combien recevra le Malawi ?). On ne sait pas comment cette aide nouvelle s’articulera avec l’aide ancienne qu’elle double. Pas davantage si elle sera multilatérale ou bilatérale. Cette aide nouvelle sera-t-elle gérée par les institutions existantes ou par des institutions nouvelles ? Elle doit en principe être allouée à la lutte contre le réchauffement climatique, mais qui donnera un contenu précis à cette notion vague ? Et qui vérifiera que les fonds alloués ont bien servi à ce noble objectif ? Les versements seront-ils des chèques en blanc, ou des affectations tatillonnes ? On a rarement – probablement jamais – vu un projet aussi coûteux aussi evanescent. Cet amateurisme suggère deux remarques.
La première concerne les relations Nord-Sud. Impossible de lire un journal ou d’écouter une émission sans une référence à la haine que le « Sud global » porterait aux pays du Nord développés et démocratiques. Il y a paradoxe à exiger l’aide de ceux que l’on déteste, à se présenter avec une sébile dans une main et un cocktail molotov dans l’autre main (comme disait Maurice Druon). Mais surtout cette haine n’est pas seulement celle des dirigeants (et peut-être des peuples) dudit Sud, elle est aussi celle des élites du Nord, qui la théorisent, la justifient, la brandissent et la répandent. On comprend que Mme Evons Njewa, la déléguée du Malawi à Bakou trouve que 300 milliards d’aide (climatique ou pas) est un chiffre « lamentablement faible ». Elle, et son pays, ont tout à gagner à voir ce montant doublé ou triplé. Et rien à perdre à le réclamer sans modération. On comprend moins bien que Mme Pannier-Runacher, la déléguée de la France à Bakou, tienne le même langage.
La deuxième répond à la question qui précède, et concerne l’idéologie du climat. La seule explication des absurdités réclamées (et partiellement obtenues) est l’invocation religieuse au réchauffement climatique. « L’idéologie, disait Revel, c’est ce qui pense pour vous ». Le mot « climat » est le Sésame qui ouvre tout grand les portes de la déraison. Il suffit de le prononcer, et plus personne n’ose regarder, réfléchir, compter, comparer, choisir. Tout devient possible, même l’impossible.
Rassurez-vous, l’aide aux dépenses climatiques du Sud ne va pas atteindre 300 milliards de dollars, et devenir plus importante que toutes les autres formes d’aide aux pays pauvres. En 2009, la COP de Copenhague avait « acté » que les pays riches consacreraient « au moins » 100 milliards par an à l’aide au climat dans les pays pauvres. Quinze ans plus tard, elle atteint à peine 70 milliards. Et c’est en en partie en accolant l’étiquette « climatique » à des dépenses qui ne le sont que par ricochet. En promettant la lune, et en ne tenant pas ses promesses, le Nord global nourrit le ressentiment du Sud global.
[1] Souvent appréciés. L’auteur se souvient de ce ministre des Finances d’une région de Chine qui disait : « Ici, nous aimons bien la Banque Mondiale. Pas pour son argent : nous en avons assez. Mais pour ses conseils ».
Restons dans les milliards, unité qui semble correspondre à la dimension des problèmes dont nous serions accablés :
– 8 milliards d’êtres humains occupent la surface du comté de Los Angeles et un peu plus que le volume du Lac Léman
– 4 milliards vivent sur 1% de la superficie de la planète
comparés aux :
– 200 000 milliards de krill
– 20 000 000 de milliards de fourmis
– et milliards de milliards de…..de bactéries et de virus etc…
Enfin, en guise de conclusion :
Gaia a grosso modo 4,5 milliards d’années. Si l’on ramène cette durée à l’échelle humaine, disons un siècle, soit à compter du 1er janvier 1924, on obtient à peu de choses près ceci :
– apparition des dinosaures 2019
– disparition des dinosaures mi 2023
– premiers hominidés 9 décembre 2024
– premières sépultures 30 décembre 2024
– début ère industrielle 31 décembre à 11h58
Soit 2 mn de culpabilité supposée pour effacer 100 ans de paix et de bonheur fantasmés…!
Hubris quand tu nous tiens…
2 mn de culpabilité pour quelques minuscules créatures qui se débattent sur une tête d’épingle gravitant à environ 30 m du Soleil. si on réduit celui-ci à la taille d’un ballon de basket.
L’ Arrogance est inversement proportionnelle à l’ Insignifiance.
Étant donné l’état des finances de la Nation, j’ai du mal à imaginer comment on pourra honorer notre part de cet accord. C’est peut-être nous, bientôt, qui auront besoin d’aide…?
Malawi 3,5 millions d’habitants en 1960, 21,5 millions d’habitants en 2024. La messe est dite.
Pour tous ces pays qui crient “misère” sur le dos du réchauffement climatique, on peut établir une liste, aller voir les chiffres et faire la même constatation démographique. De telles croissances sont du jamais vu dans toute l’histoire de l’humanité. Pour tous ces pays, il ne faut pas un GIEC mais un GIED pour la démographie.
On pourra leur donner 10X plus, 100X plus, tant que ces pays n’auront pas maitrisé leur folie démographique, cause de toutes leurs misères (et non le réchauffement, quelle blague Onusiennne !), il n’y aura rien à faire.
Leur donner de l’argent, sans exiger en contrepartie un effort de restriction drastique des naissances est une absurdité complète.
Et je ne parle pas des corruptions dans nombre de ces pays, à qui profitent l’argent réellement ?
Algérie: 4 millions d’habitants en 1830, 9 millions en 1962, 45 millions en 2024, dont un bon nombre émigrés en France principalement et ailleurs dans le monde.
Le président Tebboune a récemment qualifié la période coloniale de “génocide”, alors que sa population a plus que doublé en 132 ans tandis que la population française n’a augmenté que de 35% sur cette période.
Deux questions: 1/ Sait-il compter ? 2/ Sait-il ce qu’est un génocide?
En fait , l’augmentation de la population mondiale produit le même effet que celui des dinosaures au Jurassique ; voir mon mail
https://www.climato-realistes.fr/decarboner-cest-rentable-absolument/
Mais je pense que la fin des humains arrivera plus vite que celle des dinosaures qui ont résisté pendant des millions d’années