L’éruption du volcan Hunga Tonga pourrait continuer à provoquer des conditions météorologiques inhabituelles pendant le reste de la décennie


Une nouvelle étude intitulée Long-term climate impacts of large stratospheric water vapor perturbations a été publié le 27 May 2024 par l’American Meteorological Society. Les auteurs (Martin Jucker, Chris Lucas, and Deepashree Dutta), explorent les impacts climatiques de cette éruption intervenue le 15 janvier 2022. L’auteur principal de cette étude, Martin Jucker, en a fourni un résumé dans un article publié le 30 mai 2024 par le journal en ligne The Conversation.

Résumé de l’étude :

La quantité de vapeur d’eau injectée dans la stratosphère après l’éruption du Hunga Tonga-Hunga Ha’apai (HTHH) était sans précédent, et on ne sait donc pas exactement ce que cela pourrait signifier pour le climat. Dans cette étude, nous utilisons des simulations de modèles climatiques chimiques pour évaluer les impacts à long terme des anomalies de vapeur d’eau stratosphérique (SWV) similaires à celles causées par le HTHH, mais négligeons la charge d’aérosols relativement mineure due à l’éruption. Les simulations montrent que les anomalies SWV conduisent à un réchauffement fort et persistant des masses continentales de l’hémisphère nord pendant l’hiver boréal et à un refroidissement hivernal austral en Australie, des années après l’éruption, démontrant qu’un forçage SWV important peut avoir des impacts de surface à l’échelle décennale. Nous soulignons également que la réponse de surface aux anomalies SWV est plus complexe qu’un simple réchauffement dû au forçage par effet de serre et est influencée par des facteurs tels que les schémas de circulation régionale et les rétroactions des nuages. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour comprendre pleinement les effets pluriannuels des anomalies SWV et leur relation avec des phénomènes climatiques comme l’oscillation australe El Niño.

American Meteorological Society (27 mai 2024)

Le volcan Hunga Tonga-Hunga Ha’apai (abrégé Hunga Tonga) est entré en éruption le 15 janvier 2022 dans le royaume de Tonga, dans le Pacifique. Il a créé un tsunami qui a déclenché des alertes dans tout le bassin du Pacifique et a envoyé des ondes sonores autour du globe à plusieurs reprises.

Cette éruption pourrait expliquer l’ampleur extrême du trou dans la couche d’ozone de l’année dernière, ainsi que le caractère plus humide que prévu de l’été 2024. Les effets de cette éruption sur notre climat hivernal pourraient persister pendant des années.

Une éruption qui n’a pas provoqué de refroidissement

Habituellement, le dioxyde de soufre contenu dans le panache d’un volcan finit par provoquer un refroidissement de la surface de la Terre pendant une courte période. En effet, le dioxyde de soufre se transforme en aérosols sulfatés, qui renvoient la lumière du soleil dans l’espace avant qu’elle n’atteigne la surface. Cet effet d’ombrage provoque un refroidissement de la surface pendant un certain temps, jusqu’à ce que le sulfate retombe à la surface ou soit évacué par la pluie.

Ce n’est pas ce qui s’est passé pour Hunga Tonga.

Volcan sous-marin, le Hunga Tonga a produit peu de fumée, mais beaucoup de vapeur d’eau : 100 à 150 millions de tonnes, soit l’ équivalent de 60 000 piscines olympiques. L’énorme chaleur dégagée par l’éruption a transformé d’énormes quantités d’eau de mer en vapeur, qui ensuite a été propulsée très haut dans l’atmosphère sous l’effet de la force de l’éruption.

Toute cette eau a fini dans la stratosphère, une couche de l’atmosphère située entre 15 et 40 kilomètres au-dessus de la surface, qui ne produit ni nuages ​​ni pluie car elle est trop sèche. La vapeur d’eau présente dans la stratosphère a deux effets principaux. D’une part, elle favorise les réactions chimiques qui détruisent la couche d’ozone et, d’autre part, elle est un gaz à effet de serre très puissant.

Il n’existe aucun précédent dans nos observations d’éruptions volcaniques qui nous permette de prévoir quel effet toute cette eau aura sur notre climat et pendant combien de temps. En effet, la seule façon de mesurer la vapeur d’eau dans toute la stratosphère est d’utiliser des satellites. Or, ceux-ci n’existent que depuis 1979, et il n’y a pas eu d’éruption similaire à celle de Hunga Tonga depuis cette période.

Des effets de la vapeur d’eau mal connus

Les experts en science stratosphérique du monde entier ont commencé à examiner les observations satellite dès le premier jour de l’éruption. Certaines études ont cherché à mesurer les effets plus traditionnels des éruptions volcaniques, comme la quantité d’aérosols sulfatés et leur évolution après l’éruption, d’autres se sont concentrées sur les effets possibles de la vapeur d’eau, et d’autres encore ont étudié les deux.

Mais personne ne savait vraiment comment la vapeur d’eau allait se comporter dans la stratosphère. Combien de temps resterait-elle dans la stratosphère ? Où ira-t-elle ? Et, plus important encore, quelles seraient les conséquences pour le climat tant que la vapeur d’eau serait encore présente ?

C’est à ces questions que nous avons cherché à répondre. Pour cela, nous avons eu recours à des modèles climatiques, spécialement conçus pour faire des prévisions. Nous avons réalisé deux simulations avec le même modèle climatique. Dans l’une, nous avons supposé qu’aucun volcan n’était entré en éruption, tandis que dans l’autre, nous avons ajouté manuellement à la stratosphère l’équivalent de 60 000 piscines olympiques de vapeur d’eau. Nous avons ensuite comparé les deux simulations, sachant que toute différence devait être due à l’ajout de vapeur d’eau.

Le grand trou dans la couche d’ozone

Nos simulations nous ont permis de prédire presque deux ans à l’avance que le grand trou dans la couche d’ozone qui s’est formé entre août et décembre 2023 était au moins en partie dû à Hunga Tonga. Il est à noter que c’est la seule année où l’on pouvait s’attendre à ce que l’éruption volcanique ait une influence sur le trou dans la couche d’ozone. À ce moment-là, la vapeur d’eau avait juste eu le temps d’atteindre la stratosphère polaire au-dessus de l’Antarctique, tandis qu’au cours des années suivantes, il ne resterait plus assez de vapeur d’eau pour agrandir le trou de la couche d’ozone.

Le trou dans la couche d’ozone a perduré jusqu’à fin décembre, entraînant une phase positive du mode annulaire sud au cours de l’été 2024. Pour l’Australie, cela signifiait une plus grande probabilité d’un été humide, ce qui était exactement le contraire de ce que la plupart des gens attendaient avec le phénomène El Niño en cours. Encore une fois, notre modèle avait prédit cela deux ans à l’avance.

En termes de températures moyennes mondiales, qui sont une mesure de l’ampleur du changement climatique que nous subissons, l’impact du Hunga Tonga est très faible, seulement environ 0,015 degrés Celsius, cela a été confirmé de manière indépendante par une autre étude. Cela signifie que les températures incroyablement élevées que nous avons mesurées depuis environ un an ne peuvent pas être attribuées à l’éruption du Hunga Tonga.

[ NDT : Cette assertion ne semble pas cohérente avec les conclusions de l’étude indépendante à laquelle se réfère Martin Jucker. Il s’agit d’une étude publiée en janvier 2023 dans la revue Nature intitulée « l’éruption du Tonga augmente le risque d’anomalie temporaire de température de surface au-dessus de 1,5 °C » (Tonga eruption increases chance of temporary surface temperature anomaly above 1.5 °C). ]

Un climat bouleversé pour le reste de la décennie

Mais certains impacts sont surprenants et durables dans certaines régions de la planète. Pour la moitié nord de l’Australie, notre modèle prédit des hivers plus froids et plus humides que d’habitude jusqu’en 2029 environ. Pour l’Amérique du Nord, il prédit des hivers plus chauds que d’habitude, tandis que pour la Scandinavie, il prédit à nouveau des hivers plus froids que d’habitude. Le volcan semble modifier la façon dont certaines ondes se propagent dans l’atmosphère. Or, les ondes atmosphériques sont responsables des hauts et des bas, qui influencent directement notre climat.

Il est important de préciser ici qu’il ne s’agit que d’une étude et d’une façon particulière d’étudier l’impact que l’éruption du Hunga Tonga pourrait avoir sur notre climat et notre météo. Comme tout autre modèle climatique, le nôtre n’est pas parfait.

Nous n’avons pas non plus pris en compte d’autres effets, comme le cycle El Niño-La Niña. Nous espérons néanmoins que notre étude suscitera l’intérêt des scientifiques pour tenter de comprendre ce que pourrait signifier une telle quantité de vapeur d’eau dans la stratosphère pour notre climat.

Reste à savoir si cela confirmera ou contredira nos conclusions. Quel que soit le résultat, nous le saluons.

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20 réflexions au sujet de « L’éruption du volcan Hunga Tonga pourrait continuer à provoquer des conditions météorologiques inhabituelles pendant le reste de la décennie »

  1. Ah, ces conditionnels…
    Bon, ceci dit, une info intéressante au passage :

    Grâce aux ADN fossiles de la matière organique (MO) piégée dans des dépôts côtiers du Nord Groenland, vieux de 2 milliions d’années, l’équipe du Pr. Eske Willerslev (Univ. Copenhague) vient de montrer que le territoire était couvert à l’époque d’une forêt habitée entre autre par des mammouths, des rennes, des lièvres, etc. Les rivières transportent les déchets organiques des animaux et des restes des plantes qui se sédimentent dans ces dépôts côtiers. Bien que les ADN anciens ne soient pas totalement identiques à ceux des animaux et plantes actuelles, il est possible de comparer et de reconstituer une image des paysages, mais pas trop anciens car l’ADN se dégrade au fur et à mesure des transformations de la MO enfouie (c’est elle qui donnera le pétrole par enfouissement et augmentation de la température).
    Cette découverte est en accord avec la découverte de litières de feuilles sous la calotte glaciaire de Camp Century (base militaire américaine) et datées du Pliocène. Elle est également en accord avec la courbe isotopique générale de l’oxygène qui montre un Pliocène beaucoup plus chaud qu’aujourd’hui. Mais l’ADN permet de reconstituer le paysage de façon extrèmement réaliste. La méthode ouvre des perspectives.

    Cela nous replonge dans les débats sur l’origine du mot Groenland (Greenland, pays vert) donné par les colonisateurs vikings au moyen âge (le fameux optimum médiéval rejeté par certains, malgré les preuves scientifiques accumulées). L’optimum médiéval avait dû être bien moins chaud que le Pliocène mais la température était suffisante pour permettre une forêt et donc de réparer les drakkars.

    En somme le climat pas très ancien a constamment varié, en dehors de l’augmentation dramatique actuelle du CO2 de la faute à l’homme (et dont on cherche toujours les effets climatiques tant ils sont misérables, s’ils existent et ne sont pas dû au soleil, d’une manière ou d’une autre, voir les articles précédents sur ce site).

    Vu sur le site WUWT.
    Lien video YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=P57N9p-8NdI

    • C’est une guerre asymétrique : toute personne un peu cultivée pratique le coréen (j’ai traduit en latin pour les incultes) mais personne n’entend votre patois d’analphabète alsachien. Si vous étiez à la hauteur vous m’auriez insulté en dialecte homérique.

      • …”toute personne un peu cultivée pratique le coréen”…
        Vous n’exagérez pas un peu ???
        Les coréenophones français de souche ne doivent guère dépasser quelques centaines. Tandis que les personnes (un peu) cultivées, en France, c’est très certainement plus d’un million, voire plusieurs millions… Tout dépend où l’on place le curseur.
        Une population en voie de réduction, malheureusement, la dégradation constante de l’Education Nationale et de l’Université étend ses ravages depuis plus d’une génération avec l’approbation sournoise des politiques qui y trouvent leur compte à manipuler les intellects limités.

    • Bonsoir Frédéric.
      Cette éruption, comme beaucoup d’autres historiques et bien plus violentes, n’ont quasiment pas d’effet sur le climat à long terme. Sur quelques années au maximum puis tout rentre dans l’ordre. On aime à se faire peur.

  2. Quel que soit l’impact qu’aura l’éruption du Hunga Tonga sur le climat, nos Réchauffistes en profiteront pour accuser nos rejets de CO2 d’un réchauffement, dérèglement ou changement ( suivant l’étude finale de l’Américan Météorological Sociéty ).climatique.
    L’éruption n’aura évidemment pratiquement pas d’influence sur le climat pour nos Réchauffistes, ……. qui ne prendront, bien sûr, pas la peine d’employer le conditionnel ! Ils savent tout, eux !!!
    Climatiquement vôtre. JEAN

  3. C’est bien joli de jouer avec de la vapeur d’eau et les modèles , en oubliant que cette eau était salée (éruption phréatomagmatique) alors qu’elle issue de l’eau de mer (éruption Hunga Tunga) , donc contenant du Cl qui est connu comme tous les halogènes pour détruire la couche d’ozone. Le trou exceptionnel de la couche d’ozone de 2023 est lié à des flash vents solaires puissants en combinaison avec la quantité de chlore marin injectée dans la haute stratosphère : ces 2 processus sont dissociateurs (destructeurs) de l’ozone . (https://www.science-climat-energie.be/2024/06/07/les-rechauffements-stratospheriques-soudains-le-role-du-vent-solaire-et-de-lozone-2-2/ ). L’hiver 2023-24 avec ses bateaux pris dans la banquise en Arctique et l’été pourri de 2024 attestent non pas ce cet hypothétique réchauffement de l’HN par la vapeur d’eau mais d’un contraste thermique entre un océan arctique qui commence à se refroidir (cycles solaires à 11 ans) et et un océan intertropical extrêmement chaud (suite de l’année solaire exceptionnelle 2023). La banquise n’a pas encore récupéré son extension , parce que le Gulf Stream est très chaud (30°C au niveau de la Caroline du S) et sa transmission par le courant Nord Atlantique limite la formation de banquise au Nord de la Norvège. Donc pas de panique à bord!!! Y a pas de CO2 là dedans.

  4. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que l’incertitude et la prudence devraient être la règle pour tout scientifique qui se respecte (et beaucoup ne se respectent manifestement pas, alors comment voulez-vous qu’ils respectent les autres ?)
    Saluons la modestie des auteurs de cet article qui savent au moins que les modèles s’avèrent souvent être faux, mais avec précision.

  5. Le cycle global de l’eau dans l’atmosphère de la Terre est régi par les cellules de Hadley. Les deux principales cellules de Hadley se situent de part et d’autre de l’équateur dans ce que l’on appelle en français la Zone de Convergence Inter-Tropicale que l’on désigne en anglais par ITCZ qui s’étend en gros de -30° à +30° de latitude. Dans cette zone il y a une très forte évaporation de l’océan. La vapeur d’eau s’élève jusqu’à la stratosphère qui la la distribue dans toute l’atmosphère. Le retour de la vapeur d’eau dans la troposphère peut se faire dans les zone de divergence induites par les cellules de Ferrel dans les latitudes moyennes et par les cellules polaires aux hautes latitudes des deux hémisphères.
    Les nuages stratosphériques sont les stratus. Ce sont des nuages de glace élevés que tout le monde peut voir, en général à l’avant d’une perturbation. Tout le monde peut voir aussi les cumulonimbus qui sont des nuages orageux qui montent jusqu’à la stratosphère. Tout le monde connaît leur forme en enclume à leur sommet qui se trouve dans la stratosphère. Dans les cumulonimbus on peut trouver de l’eau liquide dite ” surfondue ” en français parce qu’elle est à une température très inférieur à 0°C. Cette eau surfondue gèle instantanément si elle rencontre un corps solide, c’est ce qui a causé l’accident du vol Rio-Paris. Bien sûr il y a aussi de la vapeur d’eau dans ces nuages qui peut se condenser et augmenter les noyaux de glace ce qui est à l’origine de la grêle.
    Les instruments des satellites ne voient pas la vapeur d’eau et les ballons météorologiques ordinaires ne montent guère au dessus de 25 km. Les ballons stratosphériques ne montent pas au dessus de 35 km. En conséquence on n’a pas d’observations directes de ce qui peut se passer au dessus de 35 km, en particulier pour la chimie. On a aussi de grandes difficultés à caractériser la circulation de retour dans la stratosphère des cellules de Hadley.
    Cependant il faut comprendre que l’évaporation dans la zone de convergence inter-tropicale est très active et injecte de la vapeur d’eau dans la stratosphère à des quantités énormes qui sont certainement très supérieures à celles résultant de l’explosion du Tonga-Hunga.
    D’après le CNRS : ” Environ 140 mégatonnes de vapeur d’eau ont aussi été injectées dans l’atmosphère à une vitesse de quarante mètres par seconde. La présence d’aérosols a été multipliée par cinq dans la stratosphère, tandis que la masse d’eau y a augmenté de 13 %.
    L’évènement a duré moins de 60 minutes. Il est donc assez difficile de croire que l’explosion ait pu produire 140 mégatonnes de vapeur d’eau, il est plus raisonnable de penser que le panache contenait beaucoup d’eau liquide accompagnée d’aérosols et de soufre gazeux. Quand il y a de l’eau, il y a toujours de la vapeur d’eau parce que l’eau liquide vaporise jusqu’à une température de – 60°C comme le montre le diagramme du point triple de l’eau.
    Dire que la masse d’eau dans la stratosphère a augmenté de 13%, c’est dire que les autres 87% s’y trouvent de manière naturelle en raison de la circulation globale atmosphérique induite par les cellules de Hadley.
    Une fois de plus on constate l’aveuglement des scientifiques obsédés par ce qu’ils appellent ” l’effet de serre “.

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