Article écrit par Enrique Ortega Gironés, un géologue habitant Valence. La version originale en espagnol se trouve ici. La traduction avec autorisation de l’auteur a été réalisée par Samuel Furfari.
Article initialement publié par Science climat et énergie le 29 novembre 2024.
Introduction
Pour commencer, voici deux petits textes retrouvés dans la littérature espagnole :
« Le ravin commence dans les montagnes de Buñol en direction de Chiva et continue à travers la municipalité de Cheste. Il traverse ensuite la plaine de Quart à côté de la Venta del Poyo, puis passe par les environs de Torrent et Catarroja, avant de se jeter dans l’Albufera de Valence. Son lit profond et large est habituellement à sec, sauf lors de crues soudaines où il coule si furieusement qu’il détruit tout sur son passage. À Chiva, il a surpris les habitants à minuit, dévastant un nombre considérable de bâtiments et éparpillant sur plusieurs kilomètres les tristes restes et les cadavres des malheureux qui n’ont pas pu échapper à la mort. »
« Le fleuve, qui dans ses plus grandes crues n’avait jamais atteint les rues de la ville, est venu cette fois inonder la partie basse, pénétrant dans les casernes de la Garde Civile, le tribunal et les prisons… »
Les nombreuses inondations du passé
Les deux paragraphes précédents, qui pourraient parfaitement décrire la récente catastrophe enregistrée dans les environs de Valence le 30 octobre 2024, correspondent à des épisodes beaucoup plus anciens. Le premier d’entre eux relate ce que l’illustre naturaliste Antonio José Cavanilles a rapporté il y a deux siècles et demi (1775) à propos du Barranco del Poyo, ce même lit de rivière qui vient d’emporter tant de vies. Le second correspond à la description faite par Vicente Boix, chroniqueur de Valence, de l’inondation de San Carlos (ainsi nommée parce qu’elle coïncide avec la fête de Saint Charles Borromeo). Cette inondation eut lieu en novembre 1864 lorsque déborda la rivière Júcar, la même qui, un peu plus d’un siècle plus tard, dévasta le barrage de Tous et toute la région de La Ribera.
En réalité, ces deux épisodes ne sont qu’un simple échantillon des nombreuses inondations qui ont dévasté la côte méditerranéenne en général (comme celles qui se sont produites à Barcelone, Malaga ou Murcie) et la région de Valence en particulier depuis des temps immémoriaux. Entre 1321 et aujourd’hui, 27 inondations ont été enregistrées à Valence (y compris la dernière en 2024), avec un intervalle moyen d’environ 25 ans, soit près de quatre inondations par siècle. L’ampleur de la plupart de ces épisodes est consignée sur des plaques ou des carreaux fixés aux murs dans de nombreuses villes riveraines, où une marque horizontale indique le niveau atteint par les eaux.
Il est très important de noter que la plupart des inondations du 14e au 19e siècle se sont produites pendant une période de froid généralisé connue sous le nom de Petit Âge Glaciaire. Dans le graphique de la figure ci-jointe, la ligne bleue représente l’évolution de la température de l’an 1200 à nos jours, tandis que les cercles rouges indiquent les moments où les 27 inondations mentionnées ci-dessus se sont produites. La continuité avec laquelle ces catastrophes apparaissent est remarquable, tant lors des périodes de hausse que de baisse des températures, semblant ainsi être complètement indépendante de l’évolution thermique.
La figure précédente montre qu’il y a également eu de grandes inondations à une époque où la Terre se refroidissait. Il semblerait donc qu’il n’y a pas de corrélation entre le réchauffement climatique et une augmentation présumée de l’intensité ou de la fréquence des dépressions à l’origine de ces inondations.
La persistance dans le temps de ces événements météorologiques extrêmes indique qu’ils font partie de la normalité climatique de la région, comme en témoignent non seulement l’abondance de documents historiques, mais aussi les manifestations artistiques. Un excellent exemple de ce type de témoignage est la peinture à l’huile « Amor de madre » (Amour de mère), du peintre Antonio Muñoz Degrain, représentant les efforts dramatiques d’une mère essayant de sauver son fils des eaux incontrôlables d’une inondation dans les vergers de Valence en 1913.
On peut dire quelque chose de similaire dans le domaine de la littérature, où les conséquences dramatiques des pluies torrentielles qui arrivaient ponctuellement chaque année au début de l’automne ont été décrites. À certaines occasions, les conditions météorologiques ont produit de grandes famines et des problèmes sociaux dus au manque de revenus du travail pour les ouvriers agricoles, ce qui a souvent dégénéré en révoltes, comme le décrit magistralement l’illustre Rafael Comenge (1855-1934) dans ses romans de mœurs.
Dans les zones rurales de la Ribera del Júcar, les crues automnales périodiques du fleuve, qui devenaient parfois incontrôlables et pouvaient finir en inondations, faisaient partie des habitudes. L’auteur de cet article, témoin direct des trois dernières grandes inondations et natif d’Alberic (une ville située à quelques kilomètres en aval du tristement célèbre réservoir de Tous), se souvient comment sa grand-mère lui racontait des histoires de son enfance dans une autre ville fluviale, Poliñá del Júcar. À cette époque, au début du XXe siècle, avant que les grands barrages et réservoirs régulateurs n’aient été construits, lorsque l’automne arrivait, c’était le veilleur de nuit qui était chargé de surveiller le niveau de la rivière pendant la nuit. Et lorsqu’il atteignait des niveaux dangereux, il réveillait les voisins pour qu’ils aillent sur la rive placer des sacs de sable et protéger les maisons de la ville, même si c’était de manière rudimentaire, précaire et temporaire.
La réitération de ces situations a conduit la sagesse populaire à consigner sa connaissance dans les proverbes. Ainsi, en regardant le ciel, lorsque les paysans voyaient que les nuages noirs entouraient les sommets des montagnes voisines, ils disaient : « Quan la Murta s’emborrasca i Matamon fa capell, llaurador, pica espart i fes cordell » (« Quand la Murta s’assombrit et que le Matamon a un chapeau, paysan, bats le sparte et fais de la corde »). La Murta et Matamón sont deux sommets des reliefs adjacents à la Ribera del Júcar, où les nuages qui apportent de fortes pluies s’accrochent généralement. Pour cette raison, le dicton exhorte les agriculteurs à passer du temps à la maison à tresser des cordes de sparte, car il sera impossible d’aller au champ pour travailler.
Avec le passage du temps, à la fin du XXe siècle, ces fortes tempêtes ont été nommées « gouttes froides », une nomenclature descriptive qui a été remplacée ces dernières années par le nom technique qui est déjà malheureusement bien connu de tous, DANA ou Dépression Isolée à Niveaux Élevés. Mais en réalité, la sémantique du nom n’affecte pas la nature du phénomène : même si un singe s’habille de soie, il reste un singe, et les DANA d’octobre ou de novembre dans la région valencienne ne sont rien de plus que les tempêtes d’automne d’autrefois.
Pour en revenir à l’actualité, les données officielles indiquent que les précipitations enregistrées lors de ce dernier épisode de 2024 n’ont pas été supérieures à celles enregistrées en 1982, lorsque les pluies très intenses ont eu lieu pendant 24 heures de déluge continu. Le volume de la crue ne l’était pas non plus : 7 500 mètres cubes par seconde en 1982, et seulement 2 500 en 2024. De plus, depuis lors, 42 ans se sont écoulés, dépassant de loin l’intervalle moyen entre les inondations mentionné ci-dessus. Par conséquent, il est difficile de justifier l’invocation du réchauffement climatique comme responsable de la résurgence (tant en fréquence qu’en intensité) de phénomènes qui, avec la même violence, se répètent systématiquement depuis bien avant l’ère industrielle et les émissions anthropiques de CO₂ dans l’atmosphère. Il convient donc de se demander pourquoi, compte tenu de l’expérience accumulée au fil des siècles et de la capacité technologique à mettre en œuvre des mesures préventives ou palliatives, il n’a pas été possible d’éviter cette catastrophe dramatique. Comme c’est souvent le cas, elle n’est pas due à une cause unique, mais à la convergence fatale de plusieurs facteurs.
Les causes de la catastrophe
En premier lieu, il faut considérer la nature elle-même, le comportement de notre atmosphère, extrêmement compliqué et difficile à paramétrer dans tous ses détails, malgré les longues séries statistiques stockées et les puissants outils de calcul fournis par le développement informatique. Ce qui s’est passé à la fin du mois d’octobre 2024 montre qu’il n’est pas encore possible de prédire en détail le comportement et les conséquences d’une DANA. Et cette limitation, non imputable à une quelconque erreur technique, mais simplement due à l’extrême complexité du processus, nous oblige à réfléchir sur la fiabilité des prévisions climatiques. Si les modèles climatiques ne sont pas encore en mesure de prédire correctement ce qui va se passer dans un avenir immédiat, dans quelle mesure les prédictions catastrophiques peuvent-elles être fiables pour un avenir lointain ?
Deuxièmement, le manque d’infrastructures adéquates. Cette inondation de 2024 a démontré de manière indiscutable à quel point ces constructions sont essentielles pour prévenir ou minimiser les effets dévastateurs des inondations. À la suite des conséquences désastreuses de la crue du Turia en 1957, le fleuve a été dévié au moyen d’un canal artificiel capable d’accueillir un débit d’eau équivalent à trois fois celui de l’Èbre lorsqu’il traverse Saragosse. Ce canal, dont la construction a été achevée en 1969, a pu détourner et conduire l’énorme flux d’eau qui s’était déversé dans la partie moyenne et inférieure du bassin du Turia, sauvant ainsi la ville de Valence d’une destruction certaine. Quelque chose de similaire s’est produit un peu plus au sud, dans la rivière Magro, un affluent du Júcar, où le réservoir de Forata, situé en amont de Turís et également achevé en 1969, a permis d’écrêter la crue (il était pratiquement vide au début de la DANA) et de contenir 30 hectomètres cubes en seulement 15 heures.
Cette capacité a permis de réduire considérablement l’impact de la crue sur les populations de la rive inférieure du Júcar, en particulier à Algemesí, où les conséquences auraient été terriblement dramatiques si ce barrage n’avait pas existé.
C’est précisément ce qui ne s’est pas passé un peu plus au nord, car entre les deux fleuves précédents, entre le Turia et le Magro, il y a un autre de ces cours d’eau qui, bien que presque toujours à sec, est capable de se transformer en quelques heures en un puissant fleuve : le Barranco del Poyo, comme Cavanilles l’a décrit dans le dernier tiers du XVIIIe siècle. Malheureusement, ce cours d’eau n’a pas de barrage régulateur et, malgré le fait que sa construction soit prévue (en amont de Cheste) depuis longtemps, les travaux n’ont jamais été exécutés. Comme la réalité l’a montré, les conséquences de l’absence de cette infrastructure essentielle ont été tragiques.
Troisièmement, il faut mentionner l’état des lits des cours d’eau. L’absence d’activités de défrichage de la végétation et l’interdiction actuelle de couper les roselières (une activité traditionnelle dans le verger consistant à utiliser les cannes pour les travaux agricoles) ont affecté la capacité de drainage, car la circulation de l’eau est entravée par la masse végétale. Cette situation réduit la vitesse de l’eau et son écoulement, formant des bouchons en raison de la végétation déracinée. Ces obstacles, lorsqu’ils sont débordés par l’eau, s’effondrent et génèrent des vagues qui avancent à grande vitesse, avec suffisamment de force pour emporter tout sur leur passage (y compris les véhicules garés dans les rues) et faire monter rapidement le niveau de l’eau. Cette situation explique en partie la différence de mortalité entre les deux dernières inondations. Malgré le fait que les précipitations et le débit de l’inondation en 1982 aient été beaucoup plus élevés qu’en 2024, sa mortalité a été d’ environ 30 morts, bien en dessous des 228 victimes (entre morts et disparus) comptées en 2024, car la plus grande vitesse de la montée des eaux a empêché de nombreuses personnes d’avoir le temps de se mettre en sécurité.
De plus, la végétation traînée par l’eau bloque les arches des ponts, les renversant dans certains cas et générant de nouvelles vagues. Il faut se rappeler que les ponts sont conçus pour permettre le passage de l’eau lors des plus grandes inondations enregistrées au cours des dernières centaines d’années, mais pas pour résister aux forces horizontales d’une masse d’eau, de boue et de végétation qui se déplace à grande vitesse. Lors de la récente inondation de 2024, 26 ponts ont été détruits ou nécessitent des réparations pour être utilisés.
Quatrièmement, il convient de mentionner les changements drastiques dans l’utilisation des sols, qui, dans les zones les plus touchées, dans les villes de la Huerta Sur, auparavant majoritairement rurales, ont été transformés en zones urbaines, en villes-dortoirs dans l’environnement métropolitain de Valence. Dans les villes traversées par le Barranco del Poyo, les infrastructures essentielles (bassins d’orage, canaux ou nouveaux canaux artificiels) n’ont pas été construites pour minimiser les effets des avalanches d’eau. On n’a pas non plus prêté attention à la délimitation des zones inondables, qui se construisent massivement et de manière inconsidérée à proximité immédiate des lits des rivières. Même en dehors des zones urbaines, mais dans les zones également sujettes aux inondations, des zones industrielles et des centres commerciaux ont été implantés, allant même jusqu’à construire des parkings souterrains d’une capacité de plusieurs milliers de véhicules.
Enfin, cinquièmement, comme cause la plus importante de la tragédie, il convient de mentionner le manque d’efficacité des différentes agences gouvernementales, tant dans les mesures préventives que dans la gestion de la crise, qui ont échoué lamentablement à tous les niveaux et sous tous les angles. Même en tenant compte des difficultés déjà mentionnées pour prédire le comportement d’une dépression de seuil, il est légitime de se demander si les mécanismes de contrôle et d’alerte ont correctement fonctionné et si la population a été prévenue suffisamment tôt pour éviter de nombreux décès. Le manque de coordination entre le gouvernement central et les gouvernements régionaux a été évident, confrontés dès l’instant où la catastrophe a commencé à se profiler, et plus soucieux de montrer le grain dans l’œil des autres que d’apporter des solutions efficaces. Cette confrontation honteuse a provoqué l’étonnement au-delà de nos frontières, donnant lieu à de nombreux commentaires dans la presse internationale, magistralement synthétisés dans la caricature ci-jointe.
Mais au-delà de la gestion désastreuse des instants précédant et suivant immédiatement le déluge, nous ne devons pas perdre de vue ce qui s’est passé au cours des décennies précédentes, ce qui a été fait ou non et qui aurait pu éviter des centaines de morts et des milliards d’euros de pertes matérielles. Malgré l’existence de nombreuses études et cartographies délimitant les zones à risque, pourquoi les communes (avec la complaisance des autorités régionales et nationales) ont-elles autorisé la construction en zones inondables ?
D’autre part, un examen sérieux et approfondi de la réglementation environnementale qui interdit le nettoyage des lits des rivières est essentiel, au moins dans les sections proches de la côte méditerranéenne, où ce type de phénomènes météorologiques apparaît de manière répétée et systématique. Comme détaillé précédemment, si les lits des rivières avaient été exempts de branchages et autres détritus, la violence de l’inondation aurait été minimisée, contribuant ainsi à réduire le nombre de victimes.
Enfin, pourquoi les infrastructures nécessaires n’ont-elles pas été construites si les études pertinentes pour l’attribution des travaux ont déjà été réalisées, avec la capacité technique et économique pour leur exécution ? Il n’est pas nécessaire d’être un expert pour affirmer que, si le barrage prévu dans le Barranco del Poyo aux environs de Cheste avait été construit, l’inondation aurait pu être considérablement réduite de la même manière que l’a fait le réservoir de Forata, évitant ainsi de nombreux malheurs.
Au cours des jours qui ont suivi la catastrophe, comme c’est souvent le cas en pareilles circonstances, il y a eu une véritable avalanche d’informations concernant la politique des barrages et des réservoirs en Espagne, et toutes les données publiées ne sont pas exactes. Ainsi, par exemple, il a été affirmé que la démolition de réservoirs et de barrages effectuée ces dernières années avait considérablement affecté le bassin du Barranco del Poyo, lui attribuant la responsabilité du manque d’infrastructures hydrauliques pour réduire le risque d’inondation. Bien que cette information soit manifestement fausse (aucun barrage a été détruit à ce ravin en particulier), il n’en reste pas moins vrai que le ministère de la Transition écologique s’est montré beaucoup plus intéressé à détruire les infrastructures existantes qu’à en construire de nouvelles. En témoigne le fait que notre pays est un chef de file de l’Union européenne dans la démolition des obstacles fluviaux, y compris les barrages et les déversoirs. Selon le rapport préparé par Dam Removal Progress, en 2021, 108 barrières fluviales ont été détruites en Espagne, 133 en 2022 et 95 en 2023 (336 au total), y compris des barrages et des déversoirs, bien plus que ce qui a été démantelé par nos voisins européens.
Dans certains cas, il s’agit d’actions justifiées par l’obsolescence ou l’inutilité de certaines structures. Mais dans d’autres cas, cela semble être dû à une obsession idéologique, dépourvue de sens pratique, similaire à celle qui a été appliquée pour justifier la démolition de plusieurs centrales thermiques produisant de l’électricité à partir de charbon. En tout état de cause, ces données ne seraient pas pertinentes pour le cas présent si ce n’était du fait que, parallèlement, le même ministère est en activité depuis 2009 dans le but précis de prévenir les inondations dans le bassin du Barranco del Poyo. La situation de ce ravin n’est pas exceptionnelle, car dans toute la Communauté valencienne, comme dans le reste de l’Espagne, il existe de nombreux travaux hydrauliques en attente d’exécution depuis 15 ans. En d’autres termes, le gouvernement s’est concentré sur la protection de la faune et de la flore fluviales, reléguant la sécurité des citoyens au second plan, en accordant plus d’importance aux intérêts idéologiques ou politiques qu’aux droits légitimes des êtres humains, tels que la sécurité et le droit à la vie.
Cependant, d’un point de vue temporel plus large, toutes les responsabilités ne peuvent pas être attribuées aux dirigeants actuels. Le gouvernement national du PP, qui était au pouvoir entre 2011 et 2018, a perdu une fenêtre d’opportunité théorique pour débloquer le projet Barranco del Poyo en accord avec un gouvernement autonome du même parti entre 2011 et 2015. Aujourd’hui, les deux partis dominants se rejettent mutuellement la responsabilité concernant la gestion de la crise, essayant de faire passer inaperçue l’incompétence affichée au cours des dernières décennies. Car en réalité, tous les problèmes décrits ont un dénominateur commun : tant le manque d’infrastructures hydrauliques que le nettoyage des lits des rivières et l’urbanisation des sols dans des endroits inappropriés sont imputables à des erreurs politiques de gestion ou à un manque de contrôle.
Les priorités politiques erronées
Cette réflexion nous amène inévitablement à une question concernant notre système politique : disposons-nous des bons mécanismes pour stimuler et faciliter l’accès des personnes compétentes aux postes de responsabilité, afin qu’elles puissent prendre les bonnes mesures au bon moment ? Dans notre système partisan, les entités du pouvoir d’État (y compris les parlements) sont devenues de simples transmetteurs des décisions adoptées par les partis, qui se sont constitués en une oligarchie contrôlant la souveraineté effective. Lorsqu’il accède au pouvoir, le parti au pouvoir attribue et distribue les postes de responsabilité selon des critères strictement politiques, sans égard à la capacité, aux connaissances et à l’expérience des personnes choisies.
Cette pratique, qui peut être considérée comme logique et acceptable pour les plus hauts postes de l’administration, a été étendue à des niveaux très bas où la responsabilité devrait être strictement technique, sous l’euphémisme qu’il s’agit de postes librement désignés. Cette approche permet, comme nous l’avons vu à plusieurs reprises au cours des dernières décennies, à des personnes sans expérience ni connaissance des secteurs qu’elles doivent gérer d’occuper des ministères, des secrétariats d’État, des conseils, des directions générales ou des présidences de grandes entreprises publiques. Pendant ce temps, les véritables experts, les fonctionnaires qui connaissent réellement le problème en profondeur, sont relégués au rôle de simples conseillers tandis que les décisions sont prises, à d’honorables exceptions près, par des individus sans expérience (et parfois sans les connaissances les plus élémentaires) qui ont tendance à privilégier les aspects idéologiques ou politiques au détriment des questions techniques. Ce n’est qu’ainsi que l’on peut comprendre qu’il y a des déficiences accumulées au fil des ans, que des décisions urgentes sont retardées ou que le contexte d’une crise est utilisé comme un champ de bataille politique.
À l’automne 1982, après la crue catastrophique du Júcar et l’effondrement du barrage de Tous, le brillant humoriste Mingote a dessiné une caricature prophétique dans laquelle il prédisait le désintérêt avec lequel la classe politique s’efforcerait d’éviter des désastres similaires à l’avenir.
Aujourd’hui, 42 ans plus tard, nous pouvons faire la même réflexion, avec le même pessimisme face à l’avenir, mais avec un facteur aggravant supplémentaire. En effet, les politiciens d’il y a quatre décennies n’avaient pas l’effronterie et le cynisme d’essayer de cacher leur incompétence derrière l’argument inexplicable du changement climatique !
Références
• ALLEY, R.B. (2000): The Younger Dryas cold interval as viewed from central Greenland.- Quaternary Science Review 19, 213-226.
• BÜNTGEN, U., TEGEL, W., NICOLISSI, K., McCORMICK, M., FRANK, D., TROUET, V., KAPLAN, J.O., HERZIG, F., HEUSSNER, K.-U., WANNER, H., LUTERBACHER, J. & ESPER, J. (2021): 2500 Years of European Climate Variability and Human Susceptibility.- Science 311, 578-582, doi:10.1126/science.1197175.
• HUMLUM, O., SOLHEIM, J.-E. & STORDAHL, K. (2011): Identifying natural contributions to late Holocene climate change.- Global and Planetary Change 79, 145-156.
• KOELLE, D.E. (2015) https://vademecum.brandenberger.eu/klima/wissen/klima_zyklus.php#klima_zyklus_koelle_extra
• LJUNGQVIST, F. Ch. (2010): A new reconstruction of temperature variability in the extra-tropical Northern Hemisphere during the last two millennia.- Geogr. Ann. A 92 (3), 339-351.
• SCHLESER, G. & VOS, H. (1993): Larix sibirica, ein Archiv der Klimaforschung.- Jber. Kernforschungsanlage Jülich GmbH, 29-37
Merci pour cet article très bien documenté (et traduit !)
Très bonne et juste analyse…
Mais qui n’empêchera pas les médias, et plus particulièrement les chaines qui ont rebaptisé leur météo en “météo-climat”, de répéter ad nauseam, sans y comprendre grand chose, que tout cela est bien entendu la faute au réchauffement climatique !
L’anti complotisme a encore de beau jour à la cafétéria !
Excellent article bien documenté historiquement.
Si effectivement la destruction de digues et barrages n’est pas en cause dans ce cas précis et il est honnête de le rappeler, la politique dit de “continuité écologique des cours d’eau” qui implique destruction fanatique des retenues d’eau dans toute l’Europe est absolument catastrophique.
Champion d’Europe des destructions de plans d’eau dans le cadre de ce délire écologiste : La France, 2d : l’Espagne qui a encore plus besoin que nous de retenues d’eau, le climat méditerranéen étant caractérisé tant par les sécheresses que par les pluies diluviennes.
Et pour ces destructions, l’Etat français, qui n’a pourtant plus d’argent, paient, c’est à dire nous, avec nos impôts.
Ce qui est grave, ce n’est pas seulement que des fanatiques écologistes font tout pour renvoyer le plus vite possible l’eau qui tombe du ciel, à la mer, c’est aussi qu’on s’ingénie à priver les agriculteurs et éleveurs d’eau, y compris agriculteurs bio car toutes les plantes ont besoin d’eau (contrairement aux fadaises qu’on peut lire), c’est aussi qu’on prive le monde rural de sites de loisirs familiaux simples et sains et c’est également qu’on détruit un patrimoine historique qui date parfois, pour les 1ers aménagements, de l’Antiquité.
A écouter : http://www.hydrauxois.org/2024/11/la-folle-destruction-du-patrimoine-des.html
On associe parfois les écolos aux déconstructeurs.
Le fantasme de la nature sauvage, vierge de toute intervention humaine est une ânerie monumentale.
Toutes les petites bêtes, oiseaux, poissons, insectes, batraciens, reptiles et autres mammifères trouvent refuge dans les zones aménagées par l’homme, et de ce fait, relativement stabilisées et sécurisées. Les crues, par exemple, ne sont pas catastrophiques seulement pour les installations humaines. Mais toutes ces petites victimes sont passées sous silence.
Avant que l’homme moderne, début de la sédentarité, s’organise, il y avait plein de petites bêtes…. il ne faut pas exagérer le rôle de l’homme.
Vidéo très intéressante et instructive !
Paris Janvier 1910
Il y a 114 ans.
Une crue exceptionnelle qui met la moitié de la ville sous les eaux. Du jamais vu de mémoire d’homme.
La cause ? ou les causes ?
– la disparition des haies
– l’artificialisation des sols
– le réchauffement climatique
Et j’en oublie probablement
Le manque de mémoire
J’ai laissé un commentaire sur
https://climatetverite.net/2024/12/07/des-pluies-torrentielles-au-sahara-font-reverdir-les-dunes/
Mais je n’y arrive plus à commenter ; si quelqu’un peut me conseiller , merci
J’ai fréquenté le Sahara de 1978 à 1982; j’ai été bloqué plusieurs fois à Ouargla pour aller à Hassi Messaoud à cause d’inondations
J’ai passé deux ans à Alrar au Nord de In Amenas et j’avais invité des géologues d’Alger pour ramasser des fossiles et des fléchettes et autres restes anthropologiques ; inondations une année et 20 cm de neige l’année suivante
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C’est vrai quà cette époque , on s’en foutait du CO2 et qu’il était de 40 ppm plus bas